lundi 15 juin 2015

La mémoire courte



« Vous avez raison, Zondi, l’afrikans, c’est fait pour gueuler et donner des ordres…L’anglais c’est bon pour revendiquer et se justifier, et vos justifications, vous savez où je me les mets. Et si ça vous plait pas, vous pouvez toujours aller chialer en zoulou. »

Tiens donc, un polar sud- africain écrit en français, et d’une bien belle manière, qui plus est ; voilà qui n’est pas banal. Et
Nous sommes 10 ans après la Libération, autrement dit, après la fin de l’Apartheid, entre Joburg et Prétoria. Les morts surgissent chaque samedi, le visage mutilé, le corps lavé.
Zondi, capitaine de police, est bien démuni ; pas le moindre indice, pas l’ombre d’une idée…
Ferdinand Despreez, dans une langue teintée d’humour sarcastique va nous jeter dans une Afrique du Sud qui tout en ayant fait sa mue, ne s’est pas pour autant débarrassée de ses vieux démons. Et c’est là tout l’intérêt de cette enquête qui mêle le fait divers et la grande histoire à la croisée de des années de plomb, et de longue et difficile  mutation de la nation arc en ciel.
La langue de Despreez, celle de ses ancêtres huguenots, est directe, imagée, pleine de rage, et sans demi-mesure. On perçoit dans cette écriture une observation minutieuse de tout ce qui l’entoure, et un regard sans concession sur  les disfonctionnements d’un pays qu’il aime et laisse sans illusion.

« Cette Afrique du sud, qu’elle soit affligée  de la réductrice épithète de nouvelle ou d’ancienne, le capitaine Zondi l’aimait de toute son âme et de ses tripes, mais il la détestait de toute sa tête… »

Voilà un polar percutant, qui laisse  KO. On en redemande !!

La mémoire courte, Louis-Ferdinand Despreez
Phébus, Mars 2006/ Points, Janvier 2008
214/250 pages

4ème de couverture :
En pleine période électorale, une série de meurtres déstabilise l’Afrique du Sud. Chaque samedi matin, un homme est retrouvé dans une poubelle, sur le siège d’un train, dans un parc ou devant le palais présidentiel. Les corps sont violemment mutilés et la peau des visages a été arrachée. Comment identifier les victimes ? L’inspecteur Zondi va tenter d’enrayer le cycle infernal de ces crimes…
A propos de l’auteur :
Louis-Ferdinand Despreez (pseudonyme littéraire) est un haut fonctionnaire et un écrivain sud-africain.

Il est le descendant d'huguenots français immigrés en Afrique du Sud après la révocation de l'édit de Nantes en 1685.

Il est d'expression anglaise mais parle et écrit en français : « Comme ce que j'écris dans mes romans n'est ni correct ni convenable, il m'a semblé que le français me permettrait d'aller beaucoup plus loin dans mes imprécations. L'argot français permet de mettre de la distance entre les mots et les situations. »

Membre de l'African National Congress, il a travaillé depuis 1994 pour la réconciliation nationale et peut-être pour des services d'espionnage.

Il considère son activité d'écriture comme « fortement incompatible avec ses autres activités » et doit respecter un rigoureux devoir de réserve et doit pratiquer la langue de bois. Il a passablement bourlingué de par le monde et n’a jamais eu les yeux dans sa poche.

 Pour le challenge d'Enna, catégorie Taille(3ème ligne)

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