lundi 28 mars 2016

Il reste la poussière



« Elle les déteste tout le temps, tous. Mais ça aussi c’est la vie, elle n’a pas eu le choix. Maintenant qu’ils sont là. Parfois elle se dit qu’elle aurait dû les noyer à la naissance, comme on le réserve aux chatons dont on ne veut pas ; mais voilà il faut le faire tout de suite. Après c’est trop tard. Ce n’est pas qu’on s’attache : il n’est plus temps, c’est tout. »

Nous sommes Patagonie, au siècle dernier. Au milieu de nulle part, dans une estancia où le temps semble s’être figé, et l’on survit plus qu’on ne vit, la mère- c’est ainsi qu’on la nomme une bonne fois pour toute- s’acharne à faire vivre cette exploitation où l’on élève vaches et mouton.
La mère a eu 4 fils : les ainés qui sont jumeaux-Mauro et Joaquin-deux brutes épaisses, des durs à la tâche, deux tortionnaires imprévisibles ; Steban, dit le débile parce qu’il ne parle pas ; et Rafael, dit le petit, celui dont personne ne voulait, sur lequel les ainés s’acharnent, et vit à l’écart de tous pour se protéger du mieux qu’il peut.

« Qu’ils l’adorent ou la haïssent, selon les jours et les humeurs, la mère est la femme sacrée. »

Il y a bien eu un père…. Mais la mère s’en est vite débarrassée, un soir où il était rond comme une queue de pelle.
C’est que la mère ne crache pas non plus sur le whisky. D’ailleurs chaque mois, elle va à la ville, et en profite pour aller picoler et jouer…
Sauf qu’un soir, ruinée, elle n’a pas d’autre choix que de vendre un fils ! Ce sera Joaquin, le moins costaud des jumeaux…

La suite, n’est qu’une longue et terrible descente aux enfers dans cet univers aussi hostile que désolé et cruel.

Il reste la poussière est un quasi huis-clos oppressant où le lecteur est très vite embarqué pour un voyage dont il n’imagine rien et qui va le ferrer jusqu’au bout.
C’est fort, cruel, et terriblement addictif ! Son écriture a la sècheresse des grandes étendues de Patagonie.

Si l’on fait un long bout de chemin avec des monstres, on y aperçoit au bout de ce même chemin une petite trouée de ciel bleu et une petite raison d’espérer !

Il y a 3 ans, après avoir découvert Des nœuds d’acier j’écrivais « Voilà une nouvelle venue dans ce monde fascinant du roman noir qui ne passe pas inaperçue, et qu’il faudra surveiller de près. »

Si Un vent de cendres m’avait un peu laissée sur ma faim, son quatrième roman  tient toute ses promesses et prouve que Sandrine Collette a toute sa place dans l’univers du roman noir !

Il reste la poussière, Sandrine Collette chez Denoël,collection sueurs froides (Janvier 2016,300 pages)


Née en 1970, Sandrine Collette est docteur en science politique.
Elle partage sa vie entre l’université de Nanterre et son élevage de chevaux dans le Morvan.
"Des nœuds d’acier" (Denoël, 2013) est son premier roman. Il obtient le Grand Prix de littérature policière 2013.
En 2014, elle publie son second roman: "Un vent de cendres" (chez Denoël) qui revisite le conte La Belle et la Bête, "Six fourmis blanches" en 2015 et "Il reste la poussière" en 2016.
 Challenge Petit bac chez Enna : Phrase (ligne 4)

2 commentaires:

  1. Un vent de cendres ne m'avais pas franchement convaincue donc là tu me donnes envie de retenter avec Sandrine Collette !

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  2. Tout comme toi, j'avais été bluffée par Des noeuds d'acier, et déçue par Un vent de cendres. Je vais me précipiter sur celui-ci!

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