dimanche 27 février 2011

Maison des autres


Grand admirateur de James et de Conrad, D'Arzo sait bien que les moments essentiels sont ceux où " il ne se passe rien ". Mais ce rien engendre ici une prose tendue et scandée où chaque mot semble arraché à la plus secrète réticence. La douloureuse question que la vieille femme de Maison des autres, après maints détours et lapsus, pose au prêtre d'un village perdu de l'Apennin émilien ne peut avoir de réponse. Dans un univers minéral et désolé que rythme le retour obsédant des saisons et des gestes, à peine troublé par le drame indicible qui fait le livre, elle renvoie chaque lecteur au profond de lui-même.
Un petit village dans la montagne où il ne se passe rien, où la vie s’écoule jour après jour…tel est le décor de cette petite nouvelle. Un curé vit au rythme de ses habitants, des clarines, des chiens qui aboient dans la nuit, des enfants du village, des morts qu’il faut enterrer.
« A cet instant on entendit, là dehors, un bruit de clarines de bronze, un bruissement comme de luzerne et d’eau qui envahissait la rue toute entière et un nombre infini de légers piétinements et de bêlements. »
La vie pourrait continuer ainsi s’il n’y avait pas cette question soudaine d’une vieille du village au prêtre………question à laquelle il ne répondra pas .......lâcheté, honnêteté ?
La solitude de l’homme d’église en général est mise en en lumière ici .Tel le commun des mortels, face aux grandes interrogations, il est face à lui même, sans réponse, livré à sa propre conscience, à ses propres doutes.
Une courte nouvelle à lire, à relire, parce qu’elle ne livre certainement pas toutes ses richesses au premier abord.
Silvio d'Arzo-Verdier-86 pages ( existe en poche chez Rivages)
Silvio d’Arzo (Enzio Comparoni) est né à Reggio Emilia en 1920. Il y est mort en 1952, sans en être jamais vraiment parti. Il déserta de l'armée en 1943 parce qu'il n'aimait pas le fascisme. Et c'était un grand admirateur de Henry James, de Conrad et de Stevenson.

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