vendredi 11 mars 2011

La Reine Alice


Hommage discret à Lewis Carroll, l'héroïne traverse réellement le miroir lorsqu'elle se découvre un cancer. Chez Lady Cobalt comme dans le laboratoire du Grand Chimiste, elle converse avec des objets magiques et des personnages extravagants: la Licorne, Cherubino Balbozar, le Grincheux, le docteur H., les Contrôleurs, la Plume, l'Attrape-Lumière... Persécutée par les uns, protégée par les autres, la dame aux turbans se joue des épreuves et devient la Reine Alice. Lydia Flem a l'élégance de parler de choses graves avec tendresse, humour et malice. D'une grande intensité, ce roman invente une langue pour dire le désarroi qui peut nous mordre à certains moments de l'existence: entre rires et larmes.
« Se battre contre soi même est un combat bien singulier, tellement plus rude à mener que battre le fer contre chez l’adversaire.
Suis-je une ou deux ? La maladie est-elle mon ennemie ou ma part d’ombre, peut-être même mon trésor ? Et si la Reine Rouge avait raison ? J’ai attrapé la Reine des maladies. Et si c’était une chance ?
J’y gagnerais à devenir une reine…
La Reine Alice. »
Lydia Flem, tout comme Alice a fait sa traversée du miroir. Dans un récit touchant, drôle, tendre, caustique, fantastique au sens premier du terme, poétique, féerique, elle va évoquer la maladie sans jamais lui donner son vilain nom.
Pour parler de ce parcours du combattant, Lydia Flem fait appel à Lewis Carroll en donnant vie à des personnages fantasques qui vont accompagner Alice.
Lydia Flem pose un regard décalé, mais juste et réaliste sur ce que vit un ou une malade au quotidien. Il n’y a jamais de voyeurisme, au contraire, on se surprend à sourire dans les situations qui d’ordinaire ne s’y prêtent pas. Tous y sont métaphore, images, jeux de mots
Je ne peux m’empêcher d’y voir un message ; en effet Lydia Flem est psychanalyste….Et si dans ce conte, elle nous signifiait qu’en fin de compte, la maladie avait un sens ?
Ce livre se lit très facilement, les chapitres y sont courts. L’écriture est dynamique, tonique.Des illustrations sont insérées au milieu du texte, accompagnées d’extraits. J’ai trouvé que cela apportait une touche supplémentaire d’originalité à un texte qui n’en manque pas.
J’ai aimé la fraicheur, la pudeur, et le réalisme de ce texte. Il peut être lu par celles et ceux qui traversent le miroir : cela ne peut être pour eux qu’une bouffée d’oxygène. Il devrait être lu par les autres pour l’extraordinaire leçon de vie qu’il constitue.
Ce fut un bonheur que de le lire .Ce serait un bonheur d’autres aient envie de le lire, et le dégustent autant que moi .Un coup de cœur à partager
En guise de conclusion, et pour donner à réfléchir, pour la route…
« Votre version de l’histoire n’est pas exactement ma version de l’histoire. Mais c’est votre traversée derrière le miroir, je n’ai pu que vous y accompagner, être à vos côtés quand vous aviez besoin de moi. Vos compagnons de route et moi-même n’avons rien fait, seulement parfois donné une chiquenaude, une petite impulsion, l’élan était en vous, l’élan est en vous… » Dit le blanc lapin à la Reine Alice
«Le présent est le présent. Le présent est un cadeau permanent. Il contient tous les possibles, le présent contient l’imprévisible. Il n’y a pas d’autre liberté. Le présent contient à chaque instant toute la vie.»
Lydia Flem-Le Seuil-304 pages
Lydia Flem, née le 15 juillet 1952, est une écrivain et romancière belge de langue française.
Psychanalyste et auteur de plusieurs livres au Seuil sur Freud, Casanova, et l’amour à l’opéra (La voix des amants, 2002), Lydia Flem se définit volontiers comme une « conteuse ». Le livre fera penser, en plus poétique, au texte de Michel Besnier Une maison n’est rien paru en janvier 2003 chez Stock, et qui avait rencontré un relatif succès commercial. (10 000 ex. vendus). Membre de l'Académie royale de Belgique, Lydia Flem publie ici son dixième livre. Elle est traduite en une quinzaine de langues.

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