« Cette lumière, c’était l’esprit qui me
guidait. J’étais prêt à leur abandonner mon corps, pourvu qu’ils ne s’emparant
pas de mon âme, de mon souffle, de ma volonté. »
« Nos corps
pourrissaient membre par membre. L’unique élément que je possédais, c’était ma
tête, ma raison. »
Le
bagne de Tazmamart a durant 20 ans" hébergé " les prisonniers
politiques du Royaume du Maroc .Il aura fallu la publication par Gille Perrault
de Notre ami le roi, pour faire
connaitre au grand public ce lieu dont les autorités ont toujours l’existence
L’endroit fut fermé , sous la pression internationale en 1991.
C’est
à partir du témoignage d’un ancien détenu, (après l’attentat manqué de Skhirate
en 1971 contre le Roi Hassan II du Maroc) que Tahar Ben Jelloun a écrit ce
roman. Le narrateur en est ce détenu, sorti vivant du bagne, mais profondément
brisé.
Les
prisonniers sont parqués dans des cachots où ils sont abandonnés à des
conditions bestiales, au milieu des scorpions
et cafards. Ils tombent les uns après les autres rongés par la maladie,
la gangrène, ou la folie. Ils sont l’objet d’humiliations, réduits à être des
numéros ; condamnés à attendre que la mort vienne les chercher.
L’auteur
n’a pas connu ce calvaire ; et cela se sent par un certain détachement
dans ses écrits. Mais, il n’en est pas moins poignant, avec des passages à la
limite du soutenable. Dans cet océan d’horreur, il parvient à faire ressortir
l’humanité des prisonniers, et leur sens aigu de la solidarité.
Confrontés
à ce long travail d’anéantissement de l’humain, seuls les plus forts survivent.
Le narrateur fait partie de ceux- là. Tahar Be Jelloun montre son long travail
sur lui pour supporter l’insupportable, supporter les autres et surtout se
supporter soi-même. Toutes les stratégies sont bonnes ; la spiritualité en
est une parmi d’autres.
« La mort pouvait venir ; quant à la
souffrance j’essayais de la considérer comme une affaire mineure, quelque chose
à dépasser. Inébranlable, puissante, telle était ma foi. Elle était isolée, je
veux dire pure. Elle me donnait une force et une volonté que je ne réclamais
pas. »
Cette aveuglante
absence de lumière, Tahar Ben Jelloun
Seuil, décembre
2000/ Points, janvier 2002
230/247 pages
4ème
de couverture :
«
Longtemps j'ai cherché la pierre noire
qui purifie l'âme de la mort. Quand je dis longtemps, je pense à un puits sans
fond, à un tunnel creusé avec mes doigts, avec mes dents, dans l'espoir têtu
d'apercevoir, ne serait-ce qu'une minute, une longue et éternelle minute, un
rayon de lumière, une étincelle qui s'imprimerait au fond de mon œil, que mes
entrailles garderaient, protégée comme un secret. Elle serait là, habiterait ma
poitrine et nourrirait l'infini de mes nuits, là, dans cette tombe, au fond de
la terre humide, sentant l'homme vidé de son humanité à coups de pelle lui arrachant
la peau, lui retirant le regard, la voix et la raison. »
A propos de
l’auteur :
Tahar
Ben Jelloun est un écrivain et poète marocain de langue française né à Fès,
le
01/12/1944
Après
avoir fréquenté une école primaire bilingue arabo-francophone, il étudie au
lycée français de Tanger jusqu'à l'âge de dix-huit ans, puis fait des études de
philosophie à l'université Mohammed-V de Rabat, où il écrit ses premiers poèmes
— recueillis dans Hommes sous linceul de silence (1971).
Il
enseigne ensuite la philosophie au Maroc. Mais, en 1971, suite à l'arabisation
de l'enseignement de la philosophie, il doit partir pour la France, n'étant pas
formé pour la pédagogie en arabe.
À
partir de 1972, il écrit de nombreux articles pour le quotidien Le Monde.
En
1975, il obtient un doctorat de psychiatrie sociale. Son écriture profitera
d'ailleurs de son expérience de psychothérapeute (La Réclusion solitaire,
1976).
En
1985, il publie le roman L'Enfant de sable qui le rend célèbre. Il obtient le
prix Goncourt en 1987 pour La Nuit sacrée, une suite à L'Enfant de sable.
Tahar
Ben Jelloun vit actuellement à Paris avec sa femme et ses enfants (Merième,
Ismane, Yanis et Amine), pour qui il a écrit plusieurs ouvrages pédagogiques
(Le Racisme expliqué à ma fille, 1997). Il est aujourd'hui régulièrement
sollicité pour des interventions dans des écoles et Universités marocaines,
françaises et européennes.
Le
1er février 2008, il reçoit des mains du Président de la République française
Nicolas Sarkozy la Croix de Grand Officier de la Légion d'honneur.
Il
est élu membre de l'Académie Goncourt, en remplacement de François Nourissier
démissionnaire.
Pour le challenge de Calypso, lecture autour du mot lumière.
Ca fait un moment que j'entends parler de cet auteur, mais je n'ai toujours rien lu de lui! Il serait temps que je le découvre :)
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