jeudi 30 septembre 2010

Bifteck

Chez Plomeur, à Quimper, on est boucher de père en fils. En pleine Première Guerre mondiale, le tout jeune André se découvre un don pour faire " chanter la chair " - et pas n'importe laquelle : celle des femmes, dont la file s'allonge devant la boucherie... Leurs hommes partis au front, celles-ci comptent sur André pour goûter au plaisir suprême. Hélas, le conflit touche à sa fin et les maris reviennent. Un matin, le boucher trouve sur le pas de sa porte un bébé gazouillant dans un panier en osier. pas un deuxième. un troisième... Du jour au lendemain, le. voilà père de sept enfants, et, poursuivi par un époux jaloux décidé à lui faire la peau. Avec la chair de sa chair. André s'enfuit à Concarneau et affrète un bateau. Direction l'Amérique ! Martin Provost sort des sentiers battus pour nous proposer une fable savoureuse, où il est question de sensualité, de paternité et du rapport, à notre terre nourricière. Il y a du Gargantua et. du Robinson Crusoé dans ce Bifteck exquis et étonnant, à consommer sans modération !
Alors que les hommes sont à la guerre, André travaille la chair, au propre comme au figuré ; et de sa chair naitra une ribambelle de bouches à nourrir, ce qu’il n’avait pas prévu du tout.
Le boucher jouisseur, se transforme illico en papa poule, et abandonne tout pour conquérir les Amériques.
J’ai ri, durant la petite heure et demie de lecture. Et comme dit le vieil adage, un bon fou rire, vaut bien un bifteck. Et qu’il fut gouteux ce bifteck, un court roman à l’allure d’un conte où tout finit bien.
Que de souvenirs ravivés, moi la petite fille de bouchers, qui comme André a appris à compter derrière la caisse, antique, du magasin de pépère et mémère ; moi qui ai la nostalgie des cervelles d’agneau arrivant encore fumantes des abattoirs……….un temps révolu.
Qu’il m’a fait rie André, avec son jargon de garçon boucher :
"André ne soupçonnais pas que les valseuses de porc que sa sainte mère faisait sauter aux petits oignons dans la cocotte pouvaient avoir le même usage que celles qui valdinguaient au fond de sa culotte."
Mais c’est que derrière le coureur de jupons sommeille un papa attentif, et soucieux de sa marmaille.
Devenu un père respectable, et tendre, les dialogues sont plus édulcorés. L’humour est là, mais plus fin, plus en retenue.
Croquez à pleine dents dans ce bifteck, appétissant à souhait, tendre comme du filet, juteux comme le suc d’un rôti qui s’échappe pour se transformer en sauce qui vous ravit les papilles.
Un bifteck à consommer les jours tristes à l’extérieur, pour jubiler à l’intérieur.
Martin Provost-Phébus-125 pages
Livre lu dans le cadre de la masse critique Babélio, et, en partenariat avec les éditions Phébus.Que tous deux soient remerciés pour ce moment particulièrement savoureux

1 commentaire:

  1. J'ai bien aimé moi aussi, d'ailleurs le cerveau a peut-être ses propres papilles...

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