« L’homme ne nait pas bon pour être ensuite
corrompu par la société. C’est un reptile poursuivi par une civilisation à
laquelle il essaye en permanence d’échapper. »
Il y a les
ouvrages qui ne m’inspirent pas ; le sujet, sans aucun doute qui fait
barrage. Avenue des géants est de ceux- là : remarqué, approuvé,
mais…rien à faire, il fait peur !!
Et hasard, il m’est arrivé un peu par obligation. Je l’ai ouvert, à
reculerons, au dernier moment….et je ne l’ai pas lâché…. Comme quoi !!!
Marc Dugain
se met dans la peau d’un type dont on voudrait pour rien au monde croiser le
chemin, ni même pour celui de vos pires ennemis.
Librement
inspiré d’une histoire vraie, celle du monstre (au propre comme au figuré
d’ailleurs) Ed Kemper, Al Kenner dans le livre,
Avenue des géants décortique, dissèque par le mot, et le style la
personnalité profonde de Al Kenner. Nous sommes aux USA, juste après l’assassinat
de Kennedy ; nous traversons la décennie « peace and love »,
celle des communautés hippies, de la contre- culture, la période qui marque le
retour des vétérans du Vietnam ….
A quelques
exceptions près, c’est lui, qui s’exprime. Ce « Je » donne une
dimension particulière, et, surtout une légitimité à cette histoire qui ne
laisse pas indemne, et laisse son lecteur scotché. Formidablement écrit, Marc
Dugain, s’attache à faire parler son personnage, sans chercher à le dédouaner,
ni à l’accabler d’avantage.
Personnage
cynique, monstre froid, dénué d’empathie, et du moindre amour, Kenner passe son
enfance entre un père effacé, malade de ne pouvoir se comporter en homme et qui
finira par déserter le foyer, et une mère violente, et castratrice, elle-même habitée
par ses propres démons hérités d’une enfance chaotique.
« Je suis la première femme à avoir fait
une fausse couche menée à son terme. »
« J’aurais eu un fils mongolien,
ce ne serait pas pire. Mais qu’est-ce que j’ai fait à Dieu pour mériter
une pareille punition ?»
Sur cette mère qui n’a pas l’once d’amour pour
son fils, ce dernier porte un regard tout aussi hostile et habité par le mal. Il
recherche désespérément le père.
Manipulateur
à souhait, il réussit, durant un temps du moins, à tromper son monde pour mieux
s’enfoncer dans sa monstruosité.
L’humour macabre
ajoute une touche angoissante supplémentaire à ce roman, pour prendre ainsi
dans ses filets, et ce jusqu’à la dernière ligne, un lecteur terrifié par ce
personnage, et subjugué par ce qu’en a fait Marc Dugain.
Avenue des
géants, Marc Dugain
Gallimard,
collection la blanche (13 Avril 2012)
361 pages
4ème de couverture :
Al Kenner
serait un adolescent ordinaire s'il ne mesurait pas près de 2,20 mètres et si
son QI n'était pas supérieur à celui d'Einstein. Sa vie bascule par hasard le
jour de l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Plus jamais il ne sera le
même. Désormais, il entre en lutte contre ses mauvaises pensées. Observateur
intransigeant d'une époque qui lui échappe, il mène seul un combat désespéré
contre le mal qui l'habite.
Inspiré d'un
personnage réel, Avenue des Géants, récit du cheminement intérieur d'un tueur
hors du commun, est aussi un hymne à la route, aux grands espaces, aux
mouvements hippies, dans cette société américaine des années 60 en plein
bouleversement, où le pacifisme s'illusionne dans les décombres de la guerre du
Vietnam.
A propos de l’auteur :
Marc Dugain
est né au Sénégal en 1957. Après des études de sciences politiques et de
finance, il a exercé différentes fonctions dans la finance et le transport
aérien avant de se consacrer à l'écriture. La Chambre des officiers, son premier roman, paru en 1998, a reçu dix-huit
prix littéraires, dont le prix des Libraires, le prix Nimier et le prix des
Deux-Magots. Il a été traduit en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux
États-Unis. Adapté au cinéma par François Dupeyron, ce film a représenté la
France au Festival de Cannes et a reçu deux Césars. Après Campagne Anglaise et
Heureux comme Dieu en France, prix du meilleur roman français 2002 en Chine, il
signe avec La malédiction d'Edgar un
portrait fascinant de J. Edgar Hoover. En 2010, il réalise et porte à l'écran Une exécution ordinaire. Après un
recueil de nouvelles salué par la critique, En bas, les nuages, Marc Dugain
signe avec L'insomnie des étoiles son
sixième roman. Avenue des géants,
paru en 2012 est son septième roman.
Roman de la 3ème sélection (retenu par
le jury de novembre)
Comme quoi, avec des à priori, on pourrait passer à côté de grandes choses. Je suis contente que ce livre t'ait plu. Les sélections Elle n'ont pas fini de nous étonner.
RépondreSupprimerAh chouette et re-chouette !
RépondreSupprimerQuel bel avis communicatif!! Il passe directement dans ma Wish-list!!
RépondreSupprimerUn énorme coup de coeur pour ce livre !!! Un coup de maitre, par contre, je trouve qu'il faut en savoir le moins possible sur le vrai personnage avant d'entamer la lecture, comme cela, on va de surprise en surprise...
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