En
ce dimanche de mars 1924, le printemps est un peu précoce. Comme chaque
dimanche dans la bonne bourgeoisie, les maîtres s’en vont festoyer tandis que
les domestiques ont leur journée pour aller voir leur mère. Jane n’a plus de
mère. Si d’ordinaire elle s’isole pour lire,
ce dimanche-là revêt un caractère un peu particulier. Elle ira rejoindre Paul,
son amant, qui doit prochainement épouser une jeune fille de bonne famille. Ce
dimanche sera leur journée, mais surtout Sa journée, dans tous les sens du
terme ; pour le meilleur, et pour le pire.
Le
dimanche des mères se déroule sur une seule journée, tout en faisant état d’un
avant et d’un après chacun s’imbriquant intimement à l’autre ; une
construction narrative qui n’est pas sans rappeler le savant désordre des
jardins anglais.
Graham
Swift, dont je découvre ici la plume brosse le portrait d’une aristocratie sur
le déclin, pas encore tout à fait dépouillée de son carcan victorien, mais n’ayant
pas encore endossé les nouvelles manières.
Cela
donne un magnifique roman, épuré à l’extrême, tout en finesse et en sensualité ; une
ode à la littérature qui n’aura pas échappé à Jane dont on devine au fil des
pages ce dont sa vie sera faite.
Un
quasi coup de cœur !
Le
dimanche des mères, de Graham Swift, traduit de l’anglais par Marie-Odile
Fortier-Masek, chez Gallimard, collection du monde entier (Janvier 2017, 144
pages)
Né
à Londres en 1949, Graham Swift a été, dès ses premiers romans, Le
Marchand de douceurs (1980) et L'Affaire de Shuttlecock (1981), considéré comme
l'un des auteurs les plus prometteurs de sa génération.
Il
est l'auteur de huit romans et d'un recueil de nouvelles, dont Le pays des eaux
(1983), qui remporta le Guardian Fiction Prize, et qui a fait l'objet d'une
adaptation cinématographique avec Jeremy Irons. En 1993, Swift reçoit le Prix
du meilleur livre étranger pour A tout jamais, puis, en 1996, le prestigieux
Booker Prize pour La Derniere tournée. Héritier à la fois de Dickens et de
Faulkner, il donne dans ses romans une vision assez sombre de l'histoire,
soulignant les grandes fractures liées au révolutions politique, industrielle
et culturelle, qui ont contribué, dans la littérature notamment, à brouiller
les frontières entre histoire individuelle et grande Histoire.
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