Tout d’abord, un grand merci à Babélio et les éditions Actes Sud pour la découverte de ce roman, car, parmi l’abondance de parutions d’automne, il aurait fallu un miracle pour que l’ouvrage arrive jusqu’à moi.
May et Cherif forment un couple uni et follement amoureux. Parents d’un petit garçon, ils attendent une petite fille. Tous deux natifs de Casablanca, ils ont fait de très bonnes études chacun en France où ils exercent respectivement les professions d’historienne et d’architectes.
A Casablanca il y a en bordure d’océan, un bidonville que les autorités ont décidé de raser. Les habitants seront déplacés et relogés plus loin, loin de tout… Cherif est engagé avec d’autres associés dans cette opération de grande envergure ; c’est ainsi que le couple retourne vivre dans leur ville natale. May ne tarde pas à comprendre que cette opération immobilière de grande ampleur aura des conséquences délétères sur la population qui non seulement va perdre ses repères, ne re retrouvera pas les facilités de transport pour aller au travail, ou à l’université. Son mari s’enferme dans ses convictions, se laisse piéger inexorablement par l’affairisme, et la corruption. Son épouse, à la fois impliquée dans sa grossesse, préoccupée par l’avenir de sa petite fille et la place qu’elle veut lui construire dans une société qui n’aime pas trop ses filles, et investie dans la défense des faibles et laissés pour compte, voit son couple vaciller. May doit lutter pour exister, et conserver une indépendance. Bien issue d’un milieu nettement plus aisé que son mari, May a sincèrement plus conscience des inégalités et des problèmes sociaux de son pays. Cherif n’est pas à une compromission près, n’hésite pas à sacrifier les moins favorisés pourvu qu’il réussisse, qu’il s’enrichisse, et nourrisse ses ambitions.
J’ai beaucoup aimé la construction de ce roman qui alterne entre le présent de chacun des protagonistes, le choc des cultures entre un couple rompu au mode de vie européen de retour au pays où il doit composer avec une autre culture, et le dialogue entre une mère et l’enfant qu’elle porte.
Yasmine Chami décrit avec beaucoup d’acuité les relations hommes/femme, la difficile conciliation entre traditions et modernités.
Un texte très bien écrit, qui demande un peu de temps, et qui dans sa seconde partie s’avère passionnant !
Casablanca Circus de Yasmine Chami, aux éditions Actes Sud (Août 2023, 210 pages)
Née en 1966 à Casablanca, Yasmine Chami poursuit ses études supérieures au Lycée Louis le Grand à Paris, avant d'intégrer l'Ecole Normale Supérieure Ulm en philosophie. Elle est également agrégée de sciences sociales. Elle se tourne alors vers l'anthropologie et travaille sur les lignées de femmes migrantes, remontant les généalogies et les histoires de la France vers le Maroc, dans une tentative d'élucidation des conséquences de la migration sur les représentations de la maternité et de la filiation. Elle publie son premier roman Cérémonie en 1999 chez Actes Sud. À la naissance de ses fils en 2001 à New York, elle décide de retourner vivre au Maroc où elle dirige la Villa des Arts de Casablanca avant de fonder et diriger pendant 10 ans une entreprise de production audiovisuelle qui propose à travers des émissions sociales diffusées par la télévision marocaine une compréhension des enjeux des évolutions de la société marocaine liées à l'urbanisation. Elle y aborde entre autres les questions liées au patriarcat, l'éducation, la place des femmes, l'argent, la sexualité et la transmission religieuse, questionnant toujours le rapport entre normes et réalités. Depuis 2011, elle se consacre à l'enseignement. Casablanca Circus est son cinquième roman.
Merci pour cette contribution. C’est un roman qui semble faire l’unanimité parmi ses lecteurs. Je note
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