Veiller sur elle

Si je m’en étais tenue à mon impression à propos de Ma Reine, premier roman de Jean-Baptiste Andrea que les lecteurs avaient beaucoup apprécié, je ne serais sans doute pas revenue aussi vite vers un de ses ouvrages. Mais parce que les lecteurs viennent de primer son tout dernier opus, je me suis, à nouveau, permis l’aventure. Et quelle aventure ! Je cherche depuis longtemps à renouer avec ce que j’appelle le vrai roman, par opposition aux pseudo -fictions, ou les éternels thèmes sociétaux du moment dont nous sommes, à mon humble avis, gavés en excès, Veiller sur elle répondait à mes attentes !!

Le roman s’ouvre sur la fin de vie d’un homme reclus parmi les religieux dont il n’est pas, mais c’est tout comme. ″ Il est là pour veiller sur elle, qui attend dans sa nuit de marbre, à quelques centaines de mètres de sa petite cellule. ‶

Nous n’en saurons pas plus car l’auteur remonte le temps jusqu’au début du siècle sur les pas de Mimo, né pauvre en France, orphelin de guerre et que sa mère enverra en Italie pour y apprendre son art :la sculpture. Il est talentueux, et il a le sens inné des proportions de l’esthétique. Non loin de là, il fait la connaissance de la fille d’une riche et influente famille génoise dont un des fils évoluera au sommet des institutions de l’Eglise. Viola et lui n’ont rien en commun, et pourtant rien ne pourra les séparer ; pas plus l’union arrangée pour et par sa famille, que l’avènement du fascisme en Italie, ni la condition féminine en vigueur à cette époque. Viola est une jeune femme en lutte perpétuelle pour sa liberté et son émancipation.

Mimo l’est tout autant pour sortir de sa condition de pauvre, venant de nulle part, et de surcroit affligé d’un handicap. C’est avec son géni qu’il parvient à s’élever, et à se forger une certaine notoriété, non sans mal.

Nous suivons donc sur le temps les destins à la fois communs et séparés de Viola et Mimo.

Je me suis plongée avec délice dans cette aventure à la fois historique, sentimentale dans le sens noble du terme et artistique. Il y a du rythme, de la profondeur, et beaucoup de recherche tout au long de ces presque 600 pages que l’on ne voit absolument pas passer, parce que Jean-Baptiste André a su construire intelligemment son ouvrage et y glisser cette petite part de suspense pour entrainer son lecteur au bout de son propos.

Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea, aux éditions l’Iconoclaste (Août 2023, 580 pages)

Jean-Baptiste Andrea est un réalisateur, scénariste et écrivain français.

Il grandit à Cannes, où il est élève de l'Institut Stanislas et fait ses premières expériences de scène, d'écriture et de réalisation. Il est diplômé de l'Institut d’Études Politiques de Paris et de l'ESCP-Europe.

Il écrit ses premiers films en anglais. Il a écrit et réalisé "Dead End" (2003), coréalisé avec Fabrice Canepa, qui a obtenu plusieurs prix, "Big Nothing" (2006) avec David Schwimmer et Simon Pegg, et "La Confrérie des larmes" (2013), avec Jérémie Renier et Audrey Fleurot.

Son premier roman publié en 2017, intitulé "Ma Reine", remporte plusieurs prix dont le Prix Femina des lycéens 2017, le Prix du premier roman de la La Forêt des livres 2017, le Prix "Envoyé par La Poste" 2017 ou encore le Prix Alain-Fournier 2018.

Après "Cent millions d'années et un jour" (2019), il publie son troisième roman, en 2021, "Des diables et des saints", pour lequel il obtient le Grand Prix RTL-Lire Magazine Littéraire 2021 et le prix Ouest-France Étonnants voyageurs.