mercredi 16 mars 2011

Gibier d'élevage





En pleine guerre, un avion américain s'écrase dans les montagnes japonaises. Le rescapé est aussitôt fait prisonnier par les villageois. Or il est noir... Aux yeux du jeune enfant naïf et émerveillé qui raconte cet épisode, sa nationalité, sa race, sa langue n'en font pas un étranger ou un ennemi, mais une simple bête dont il faut s'occuper.
Où finit la bêtise, où commence la haine de l’autre ? Est-ce l’ignorance, ou bien le mal ancré au fond des personnes qui conduisent à ces faits là ?
L’auteur donne la parole à deux frères dont « Crapaud » et un de leurs amis « Bec de lièvre » qui dans la campagne japonaise, au milieu de la forêt, dans un pays en guerre, voient pour la première fois de leur vie, un Noir, ennemi de surcroit parce qu’américain…..
« Les ennemis qu’elle tête peuvent-ils bien avoir ? »
« C’est un Noir, un Noir ! Pas un ennemi ! » A la limite, c’est encore pire …..
« C’est une bête, rien qu’une bête, dit mon père avec gravité. Il pue comme un bœuf »
Voilà à fond toute l’essence de cette petite mais très dense nouvelle. Comment éduquons-nous nos enfants, comment les plaçons nous devant l’autre qui n’est pas comme nous ? Comment l’ignorance des parents conduit irrémédiablement à l’ignorance des enfants dans une société fermée à toute autre culture à l’époque où se situe l’histoire ?Même si ces enfants apprendrons à apprivoiser ce pauvre homme de couleur, ramené au rang de bête, même s’ils tous surpris, se rendent compte qu’il est bâti come eux, et même mieux (avec à ce sujet un passage croustillant que je ne dévoilerai pas !!), le mal est fait.
Cette histoire se passe il y a longtemps, et pourtant, et pourtant……de nos jours, elle serait encore bien actuelle.
Ce livre est court, et comme souvent en littérature japonaise, ce n’est pas forcément le plus accessible. On ne lit pas cela comme on lit un roman de plage. L’écriture est belle, prenante.
Je n’avais pas forcément prévu de lire cet auteur ; il était mis en valeur à la médiathèque, et je me suis dit :pourquoi pas ? Sans regret.
Kenzaburô Ôé-Folio n°3752-105 pages
Ecrivain japonais né en 1935, Kenzaburô Ôé grandit sur l'île méridionale de Shikoku, qui sera le décor principal de son œuvre romanesque, puis fait des études de littérature française. Dès la fin des années 1950, il publie ses premières nouvelles et c'est en 1964, avec 'Une affaire personnelle', qu'il connaît son premier grand succès. Tout en écrivant de nombreux romans et nouvelles, il est critique littéraire, spécialiste de William Blake, Malcolm Lowry et Dante. Son œuvre est orientée vers l'engagement politique de gauche et l'analyse psychologique. Le génie de Kenzaburô Ôé consiste à concilier, dans un style original, un certain naturalisme, des fragments autobiographiques, une réflexion sociologique et historique et une imagination inégalée par les auteurs japonais modernes. En 1989, il reçoit le prix Europalia et, en 1994, le prix Nobel de littérature, signes d'une reconnaissance internationale.

challenge des Nobel n°7

1 commentaire:

  1. en attente de lecture chez moi... rassurée par ton commentaire
    bonne fin de journée

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