« Quand on a perdu sa mère, il
faut renoncer au luxe d’être enfant. »
Ce livre
écrit il y a vingt- ans, et pour la première fois traduit en français est d’une
incroyable modernité. C’est également un hymne à la Vie, à toutes ces vies qui
nous entourent. Véritable déclaration d’amour au grand lac salé et son
écosystème, il n’en est pas moins un vibrant hommage que l’auteur rend à sa
mère, aux femmes de sa famille, et à leur combat pour la vie.
Récit à
plusieurs entrées, dont le texte est certes, triste, mais d’une infinie beauté ;
un texte d’une tristesse lumineuse.
L’auteur,
fervente défenderesse de ce bout d’Amérique loin des paillettes, et du béton,
passionnée d’ornithologie, scrute jour après jour le niveau du Grand Lac salé,
dans l’Utah, dont dépend la survie d’une réserve d’oiseaux, alors qu’elle
affronte la maladie et la fin de vie de sa mère.
« Ce qui cause notre souffrance, n’est
pas le fait de mourir, mais le refus de la mort. »
« Tout ce que nous avons, c’est
l’instant présent. J’aimerais que vous puissiez accepter cela et renoncer à vos
prévisions. Laissez-moi vivre, tout simplement, pour que je puisse mourir. »
Nous sommes
sur les terres du culte Mormon, et sans prosélytisme, l’auteur nous montre une
autre façon de concevoir la fin de vie : en se focalisant sur la vie, tout
simplement, qui se vit jusqu’au dernier instant dans l’accompagnement familial,
dans la réalisation et l’accomplissement des plaisirs ordinaires de la vie,
presque comme si de rien n’était. Tout au long du chemin que Terry accompli
avec sa mère qui n’ignore rien de son état, j’ai senti beaucoup de sagesse ;
j’ai beaucoup pensé à la manière dont nous vivons notre vie, et surtout à la façon
que nous avons de ne pas la vivre assez pleinement.
L’auteur n’aurait
sans doute pas traversé cette épreuve de la même manière si elle n’avait pas eu
les oiseaux. Ils sont si présents, qu’on en perçoit souvent le mouvement d’ailes.
Chaque chapitre porte le nom d’une espèce ; Le coulis courlieu, bruant des
neiges, fuligule à tête rouge, le pluvier kildir, le jaseur boréal…et tant d’autres.
Terry Tempest Williams est parvenue à captiver la profane que je suis en la
matière. J’ai appris énormément de choses sur cet écosystème si fragile, et sur
le subtile équilibre qui y règne. Aussi, vous saurez faire la différence entre
un oisillon nidifuge, et un oisillon nidicole.
L’auteur a
su tisser de nombreuses passerelles entre les habitants des airs, et leurs
difficultés devant les changements environnementaux, et les humains victimes d’eux
-même.
Ce récit, à plusieurs entrées, se lit sur
plusieurs niveaux. Chacun y trouvera de quoi s’enrichir, et réfléchir. Prenez
le temps, comme moi, de le savourer. Il ne supporte ni la voracité, ni la
précipitation. Prenez le temps de vous documenter, de visualiser les oiseaux.
« Je prie les oiseaux parce que
je crois qu’ils porteront les messages de mon cœur vers les cieux. Je prie les
oiseaux parce que je crois en leur existence, en la façon dont leurs chants
commencent et finissent la journée-invoquant et bénissant la Terre. Je prie les
oiseaux parce qu’ils me font penser à ce que j’aime et non à ce que je redoute.
Et à la fin de mes prières, ils m’enseignent comment écouter. »
Je remercie
infiniment Marie Anne Lacoma des éditions Gallmeister pour l’envoi de ce livre. Refuge restera un ouvrage marquant. Le reste me parait bien fade tout d'un coup.
Refuge, Terry Tempest Williams
Gallmeister (05/04/2012)( 1ère
publication en 1991)
352 pages
4ème de couverture :
Utah,
printemps 1983. La montée des eaux du Grand Lac Salé atteint des niveaux
records et les inondations menacent le Refuge des oiseaux migrateurs. Hérons,
chouettes et aigrettes neigeuses, dont l’étude rythme l’existence de Terry
Tempest Williams, en sont les premières victimes. Alors qu’elle est confrontée
au déclin de ces espèces, Terry apprend que sa mère est atteinte d’un cancer,
comme huit membres de sa famille avant elle – conséquence probable des essais
nucléaires menés dans le Nevada au cours des années 1950. Bouleversée par la
douleur de celle qu’elle accompagne dans la maladie, Terry se plonge dans une
enquête sur les effets dévastateurs des retombées radioactives.
Remarquable étude naturaliste et chronique
familiale saisissante, Refuge entrelace le destin des oiseaux du Grand Lac Salé
et celui des hommes frappés comme eux par les drames écologiques. Dans une
langue tout à la fois sobre et poétique, Terry Tempest Williams refuse la
tragédie et lance un formidable appel au renouveau.
A propos de l'auteur:
Terry
Tempest Williams est née en 1955 dans le Nevada et a grandi dans l’Utah.
Naturaliste et activiste engagée dans la défense des droits des femmes, son
combat pour la préservation de l’environnement l’amène à témoigner devant le
Congrès à plusieurs reprises. Elle y dénonce les effets des essais nucléaires
réalisés dans le désert du Nevada et qui sont alors minorés par le
gouvernement. Auteur de nombreux récits, essais et poèmes, elle est aujourd’hui
une voix incontournable de l’Ouest américain.
Le courlis corlieu
Le jaseur boréal
La fuligule à tête rouge
Pour l'état de l'Utah dans le cadre du challenge 50 états/50 billets organisé par Sofynet 21/51
Ils mettent parfois bien du temps à nous arriver ces grands romans américains...
RépondreSupprimerCela me donne envie de découvrir cet auteur !!
RépondreSupprimerMerci pour cette critique, Mimi :)
Je note !!
RépondreSupprimerJ'adore les oiseaux!!! Je me le note ;)
RépondreSupprimerC'est très tentant, je prends note de suite.
RépondreSupprimerMerci pour cette belle chronique ;)
Je ne peux que noter !!!!
RépondreSupprimerCe roman m'a l'air passionnant ! Je le note !
RépondreSupprimerCe n'est pas un roman, mais un récit !!
SupprimerHop, billet ajouté ! (et livre ajouté sur ma LAL !)
RépondreSupprimerJe viens de passer chez Keisha qui évoque aussi ton billet.Et bien, quel bel enthousiasme ! Je le lirai d'ici peu, même si j'ai un peu peur de déprimer après ça...
RépondreSupprimer