samedi 31 août 2013

Je ne suis pas celle que je suis


Une narration, dans un style classique, qui nous fait prendre connaissance  avec Donya . Elle est une jeune et belle étudiante iranienne. Nous sommes dans les années 90, les Mollah verrouillent la société, la jeunesse est brimée, les femmes sont des demies citoyennes.

Une jeune femme à Paris, fraichement débarquée d’Iran, vivant de petits boulots précaires, entame une psychanalyse dont les séances successives alternent avec la narration plus impersonnelle.

De L’Iran en passant par la Turquie, pour finalement s’établir à Paris, Donya nous est présentée tantôt d’un point de vue global, et sous l’angle de l’intime. Ses traits, sa personnalité se dessinent au fur et à mesure. L’histoire de cette jeune femme s’est imprégnée de la violence du régime des Mollahs. Nombreux sont les passages où l’émotion, et la révolte nous étreignent tant par ce qui s’y passe que par le ressenti de son héroïne.

« Être née fille dans ce putain de pays ne fait pas de moi une criminelle ».

L’Iran, la violence faite aux femmes, le poids de l’Islam radical sont des thématiques récurrentes dans les ouvrages de Chahdortt Djavann parce  qu’elles ont façonné la femme et l’écrivain qu’elle est devenue.

Quelle est la part d’autobiographie dans ce roman ?
« Je suis mon personnage et je ne le suis pas » dit-elle en épilogue.

J’ai également apprécié les séances de psychanalyse, pour toute l’ambiguïté dont une telle thérapie peut être faite, pour la verbalisation du travail sur soi, l’espoir d’aller mieux qu’il suscite, et pour le travail d’intégration de cette jeune femme qui entame son analyse en français alors qu’elle n’en possède que les rudiments.

« Faire miens des mots qui ne l’étaient pas et explorer avec eux tout un monde à l’intérieur de moi-même, dont l’accès m’était impossible… c’est plus qu’un voyage initiatique…»

Astucieusement construit, ce livre est prenant, et difficile à lâcher. Et s’il « est le premier volume d’une histoire à suivre », c’est avec impatience que j’attends d’avoir cette suite en main.

Je ne suis pas celle que je suis, Chahdortt Djavann
Flammarion, Août 2011
535 pages
 


4ème  de couverture :

Des vies différentes dans des villes différentes, et une même femme. Deux histoires entrelacées. L'une, picaresque, nous fait voyager en compagnie de l'héroïne, qui traverse mille et une épreuves, de Téhéran au golfe Persique, de Dubaï aux rives du Bosphore. Et l'autre, intime, à Paris, se construit dans le cabinet d'un psy. Pour la première fois une psychanalyse nous est dépeinte, séance par séance, comme un tableau impressionniste. Le rapport au père, à la mère, aux hommes, la prison, la torture, le viol, la prostitution, la solitude, l'exil et la langue française dont il faut s'emparer pour faire le récit d'une vie, pour se réconcilier avec la vie sont les thèmes de ce livre. Après Comment peut-on être français ? et La Muette, ce roman, dense et incisif, drôlement triste et tragiquement gai, est tout simplement impressionnant.

A propos de l’auteur :

Née en Iran en 1967, Chahdortt Djavann vit depuis plus de dix ans à Paris où elle a étudié l'anthropologie. Elle est romancière, avec Je viens d'ailleurs (Autrement, 2002), Autoportrait de l'autre (Sabine Wespieser, 2004), et Comment peut-on être français ? (Flammarion, 2006 ; J'ai lu, 2007) ; et essayiste, avec en particulier, Bas les voiles (Gallimard, 2003), A mon corps défendant, l'Occident (Flammarion, oct. 2007), et tout dernièrement La dernière séance (Fayard, 2013)


La ronde des "gros livres" chez Tête de litote .

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