jeudi 5 novembre 2015

L'homme inquiet



Mon cher Wallander

Vous et moi, n’ayons pas peur des mots, c’est du sérieux ! Je ne vous ai jamais fait défaut, vous ne m’avez jamais déçue.
Mais, nous le savons bien, vous et moi, les bonnes choses ont toujours une fin. Votre "papa littéraire "avait prévenu, avec l’homme inquiet, vous auriez droit à une retraite bien méritée.
Ce jour, je l’ai tant redouté. Maintes et maintes fois j’ai reculé le moment de faire le dernier voyage en votre compagnie. J’aurais bien fait encore un peu trainer les choses…Mais votre " papa littéraire "a eu la bien mauvaise idée de nous quitter il y a 1 mois. Alors voyez-vous, je n’ai pas pu résister.

Je vous avais quitté un peu usé, désabusé, et bousculé par ce monde qui change trop vite pour vous. Je vous retrouve au bout du rouleau : votre diabète s’aggrave, vous vieillissez, et vous avez la mémoire qui flanche.
La ville vous incommode, si bien que vous vous vous êtes réfugié au vert, avec votre fidèle toutou. Seule la perspective de voir Klara vous réjouit. Ah oui, j’oubliais, vous êtes devenu grand-père ; et cela met un peu de joie dans une vie de plus en plus morose. Votre ex-femme s’enfonce dans l’alcoolisme, votre amour de toujours est venu vous faire ses adieux avant de s’éteindre…
Bref, à quoi bon travailler, si ce n’est tirer au clair une sombre affaire qui concerne directement votre fille et votre gendre. Sans cela, vous auriez sans doute, raccroché.

Certes ce n’est pas votre plus belle enquête. Certes vous êtes de plus en plus poussif. Mais c’est ici, dans votre ultime aventure que vous vous révélez le plus humain, et que vous vous faites plus attendrissant que jamais. Votre testament est empreint de nostalgie. Vos années défilent, et vous semblez ne plus avoir de prise sur les choses. Vous semblez baisser les bras, et laisser la pénombre vous envahir. J’ai de la peine de vous voir aussi diminué, et je vous admire de vouloir mener à bien votre ultime mission avant de vous éclipser en douceur, et sans douleur.

Mon cher Wallander, vous m’avez comblé ma vie de lectrice de polar. Et pour cela, je ne vous remercierai jamais assez. Tout comme votre "papa littéraire " à qui je dédie ce billet en guise d’hommage.

Adieu Wallander.

L’homme inquiet, Henning Mankell
Seuil, Octobre 2010/Points, Janvier 2012
500/600 pages

4ème de couverture :
Grand-père d’une petite Klara, Wallander a réalisé ses rêves : vivre à la campagne avec son chien.

Après avoir évoqué avec le commissaire la guerre froide et une affaire de sous-marins russes dans les eaux territoriales suédoises, le beau-père de sa fille Linda, ancien officier de marine, disparaît, puis c’est le tour de la belle-mère. Soupçons d’espionnage. Au profit de la Russie ? Des États-Unis ? Parallèlement à la police de Stockholm et aux services secrets, Wallander mène sa dernière enquête. C’est alors qu’il amorce sa propre plongée en profondeur : les années écoulées et les femmes de sa vie défilent. Et la petite Klara devient son ultime balise.
A propos de l’auteur :
Henning Mankell, né en 1948, partage sa vie entre la Suède et le Mozambique. Lauréat de nombreux prix littéraires. Outre la célèbre « série Wallander », il est l'auteur de romans sur l'Afrique ou des questions de société, de pièces de théâtre et d'ouvrages pour la jeunesse.Il est mort le 5 octobre 2015.

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