mardi 29 août 2017

L’art de perdre



Naïma, est une jeune femme active. De ses origines, elle sait peu de choses, si ce n’est que c’est en Algérie que tout a commencé. Mais de l’Algérie elle ne sait pas grand-chose non plus…

Alice Zeniter nus entraine sur les traces de cette famille sur 3 générations : des montagnes de Kabylie à Paris. Ali, le patriarche est producteur d’huile d’Olive, fidèle à la France durant ce qu’on appelle pudiquement Les évènements. Il fuira en abandonnant tout derrière lui, emmenant femme et enfants pour se retrouver quasiment captif dans des camps construits à la hâte.
Hamid, le fils ainé se drape dans son silence (tout comme Ali et sa femme du reste) pour se fondre aux autres, se construire un avenir, et une famille. Naïma, est de la troisième génération.

C’est dans le silence, la peur viscérale des représailles, la foi presque aveugle en un avenir qu’ils n’ont pas eu le temps d’appréhender que cette famille va évoluer et transmettre ses non- dits.

La grande force de cette fresque à la fois familiale et historique ( notons au passage le travail documentaire effectué par l’auteur afin de coller au plus près aux réalités ) est sa qualité narrative  qui en fait un récit d’une grande fluidité .

Alice Zeniter touche à un sujet hautement sensible, quel que soit le côté où l’on se pose. Sans parti pris, Alice Zeniter rend néanmoins (et c’est heureux) un hommage vibrant aux harkis répudiés-si n’est pire- dans leur pays de naissance, et maltraités dans leur pays d’adoption. On ne dira jamais assez les horreurs dans les camps de Rivesaltes, où il y eu malgré tout de doux moments de solidarité.

La boucle semble bouclée quand Naïma à la faveur d’un déplacement professionnel va à la rencontre de sa famille restée au village ; rencontre teintée de moments émouvants et chaleureux.

Ce roman que l’on prend à pleines mains pour ne pas le lâcher se lit ave à la fois facilité et gravité. Il semble bien engagé dans les premiers prix littéraires de la saison. J’espère qu’il aura devant lui un beau parcours .

L’art de perdre, d’Alice Zeniter, chez Flammarion (Août 2017,510 pages)


Alice Zeniter est née en 1986.Normalienne, en thèse d'études théâtrales à la Sorbonne nouvelle,elle a vécu plusieurs années en Hongrie où elle a entre autres enseigné le français. Elle écrit aussi pour le théâtre (lauréate de l'aide à la création du Centre National de Théâtre en 2010), a collaboré à plusieurs mises en scène de la compagnie Pandora et travaille comme dramaturge et auteur pour la compagnie Kobal't.

"Deux moins un égal zéro", son premier livre publié à 16 ans (éditions du petit véhicule), lui a valu le Prix littéraire de la ville de Caen. "Jusque dans nos bras", publié en 2010, a été récompensé par le Prix littéraire de la Porte dorée et le Prix de la Fondation Laurence Trân.

"Sombre dimanche" reçoit le Prix Inter et le prix des lecteurs l'Express 2013.

En 2015, elle publie "Juste avant l'oubli".

Elle collabore à l'écriture du long métrage Fever, une adaptation du roman éponyme de Leslie Kaplan, réalisé par Raphaël Neal et sorti en 2015.


3 commentaires:

  1. 100% d'accord, je viens de le terminer et je trouve ce roman remarquable tant par sa narration que la pédagogie dont fait preuve l'auteur. J'ai l'impression de mieux comprendre... et je ne me suis pas ennuyée une seconde !

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  2. Je vais le lire avec la sélection finale pour le Prix Landernau...

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