Jeanne
a la soixantaine ; on la devine solitaire. Sa vie est rythmée par quelques
rituels, et en particulier celui de ses deux passages hebdomadaires au Franprix
de la rue du Rendez-vous. Jeanne observe ; Jeanne imagine un tas de choses ;
Jeanne se construit un monde fantasmé dans lequel s’insère le sien.
Marie-Hélène
Lafon nous avait habitué à disséquer le monde rural, à rendre attachant ses ruraux, humbles et sans gloire.
Elle
délaisse ici son Cantal natal pour rallier la grande ville de solitude et d’anonymes
transparents. Place à Gordana, la caissière et Fortunato, un habitué lui aussi.
Deux âmes solitaires, comme un peu perdues dans ce monde qui va à toute allure.
Ici au Franprix, la vie semble s’arrêter. Jeanne, la narratrice, redonne vie à
tout cela, à sa façon.
On
reconnait la plume incisive et concise de Marie-Hélène Lafon ; une plume
sèche et aride ; une plume riche toujours à la recherche du mot juste. L’ensemble
parait avoir été cousu main, point après point, calé au millimètre près.
On
aime, ou pas cette forme d’écriture, et cet univers si particulier à l’auteur.
Cette dernière se fait suffisamment rare pour profiter du moment où elle
sortira du bois.
Si
l’ouvrage m’a procuré un certain plaisir de lecture, il fut néanmoins moins
profond que pour les précédents romans. Marie-Hélène me semble plus convaincante
sur sa terre auvergnate que sur le bitume parisien. Mais cela n’est que mon
humble avis.
Nos
vies de Marie-Hélène Lafon, chez Buchet Chastel (Août 2017,185 pages)
Professeur
agrégée de Lettres Classiques, Marie-Hélène Lafon choisit d’enseigner
dans un collège situé en Zone d’Éducation Prioritaire.
Elle
commence à écrire en 1996. Son premier roman, "Le Soir du chien", a
reçu le prix Renaudot des lycéens. Elle préside le prix littéraire des lycéens
de Compiègne en 2003-2004.
"Histoires"
obtient le Goncourt de la nouvelle en 2016.Elle a publié, entre autres, "Joseph",
"L’annonce", "Les pays" ;"Nos vies" a été
publié en 2017.
Je pense que je vais le lire, il me tente bien. La rue du Rendez-vous m'évoque pas mal d'heures de ma jeunesse et je suis curieuse de voir ce que donne l'écriture de Marie Hélène Lafont dans cet univers.
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