mercredi 15 mai 2019

Le diable en personne


C’est un peu le paradoxe de ces romans noirs : ils sont noirs, terriblement noirs, poisseux, ils nous racontent la lie humaine, et en même temps ils nous attirent, et nous tiennent en haleine jusqu’au bout. Parce qu’au fond, ils nous racontent autre chose qu’une banale histoire de bons et de méchants.

Dans la forêt de Géorgie du sud vit une sorte d’ermite, de vieil ours mal-léché ; un original qui se promène avec un mannequin (Marjean qu’il habille, à qui il parle, qu’il promène en voiture) et qui accueille quiconque débarque sur ses terres, armé jusqu’aux dents.

Maya déboule chez lui un jour alors qu’elle vient de s’échapper des griffes de ses tueurs. Maya, est une prostituée malgré elle, la préférée de Le Maire . Seulement, Maya a entendu ce qu’elle ne devait pas entendre. Elle doit mourir…

Drôle d’attelage que celui que forme Maya et Leonard. Leonard ne supporte pas que l’on marche sur ses platebandes ; mais Léonard a ses principes. Quiconque touchera à Maya aura affaire à lui.

Ce roman est la rencontre de deux cabossés de la vie, de deux révoltés qui vont apprendre à se connaître. C’est la confrontation l’humanité sauvage dans un environnement apaisant, autre personnage du livre.

J’ai aimé la manière dont Peter Farris a construit ses personnages, et les a étoffés. Leonard et Maya sont évidemment les plus attachants ; avec une mention particulière en ce qui me concerne pour Leonard.

Peter Farris a autant pensé à l’action, qu’au suspense. Son écriture est vive, forte et sans mièvrerie. Il signe ici à la fois le portrait d’une certaine Amérique, et de deux écorchés qui ne pouvaient que se rencontrer pour se révéler.

Du très bon Gallmeister !

Le diable en personne de Peter Farris, traduit de l’américain par Anatole Pons, chez Gallmeister (Août 2017, 270 pages), disponible en poche (Mars 2019, 270 pages).

Trophée 813 du meilleur roman étranger 2018 / Prix du roman noir du festival de Beaune 2018 / Finaliste du Grand Prix de Littérature Policière 2018


Né en 1979, Peter Farris vit aujourd’hui dans le comté de Cherokee en Géorgie. Après sa licence, la musique prit beaucoup de place dans sa vie, pour le meilleur ou pour le pire. Plutôt que de poursuivre ses études ou de tenter de faire carrière, il est devenu chanteur dans un groupe de rock bruyant du Connecticut appelé CABLE. Le groupe fit autant de concerts et d’enregistrements que possible, et se produisit principalement dans le nord-est des États-Unis. Leur album, disque-concept intitulé The Failed Convict, partage avec Dernier Appel pour les vivants une certaine synergie créatrice, au point que des paroles de certaines chansons ont été placées en épigraphe dans le livre. À bien des égards, l’album est le pendant musical du livre.

En parallèle de ses activités musicales, Peter Farris gagnait sa vie comme guichetier dans une banque de New Heaven, dans le Connecticut. Il y a travaillé quelques semaines avant que la banque ne soit cambriolée.  Même si le braqueur était armé, il ne sortit jamais son pistolet. Inutile de dire que cet événement a profondément marqué Peter Farris, et quand il se mit sérieusement à écrire, il savait qu’une scène de braquage interviendrait dans son premier roman.



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