« La justice a été la grande affaire de ma vie. Il m’arrive même de parler de ″ma justice″ pour évoquer la quasi-fusion avec un monde dans lequel j’avais décidée de vivre. Je n’ai cessé de l’interroger, la confronter, la bousculer et lui demander des comptes dans un tête-à-tête singulier et intime. »
On peut ne pas adhérer à tous les combats de Gisèle Halimi, ne pas partager toutes ses sensibilités. En revanche, on ne peut que saluer l’extrême passion qu’elle a vouée à son métier d’avocate (elle tient à la féminisation) entièrement consacré aux femmes, au Droit des femmes !
Dans cet entretien avec Annick Cojean, journaliste et documentariste chevronnée (j’ai beaucoup apprécié la collection documentaire Empreintes), Gisèle Halimi, livre sur le fil, son testament, sa feuille de route, à nous les femmes, et notamment aux jeunes générations. Rien n’est acquis, tout reste à conquérir à consolider et surtout à inscrire dans la durée. S’il y a un seul message à retenir, il serait à mes yeux celui-là !
Avec le professionnalisme que l’on connait, Annick Cojean balaie en peu de questions (mais ciblées et calibrées) l’étendue des luttes de Gisèle Halimi, avec bien entendu, en tout premier la matrice de sa vocation, de ses convictions et de ses engagements tout au long de sa vie.
La justice et les femmes !
L’injustice de naître fille, et de ne pas avoir les mêmes droits que les garçons. L’injustice de la torture, l’injustice des lois scélérates faites par les hommes.
Gisèle Halimi n’a jamais pu se résoudre à servir ses frères, devoir reproduire ce que sa mère avait vécu, et que l’on choisisse son destin à sa place. Toutes ses luttes, sa rébellion sont nées de l’enfance !
L’ouvrage est un condensé d’une vie d’engagements-parfois audacieux-et de luttes pour lesquelles il fallait de l’endurance, de la constance et des convictions en béton armé ; Gisèle Halimi le conclu par les trois choses essentielles qu’elle avait à dire aux femmes et en particulier aux jeunes générations, moins concernées par les avancées -fragiles- qu’elle considèrent comme acquises. Pour ma part, je n’en renie aucune !
« Soyez indépendantes économiquement »
« Soyez égoïstes (…) Vous êtes importantes. Devenez prioritaires »
« Refusez l’injonction millénaire de faire à tout prix des enfants. »
Merci à l’éditeur et Netgalley pour la lecture de ce livre !
Une farouche liberté de Gisèle Halimi chez Grasset (Août 2020, 160 pages)
Gisèle Halimi, née Zeiza Gisèle Élise Taïeb, est une avocate, militante féministe et femme politique tunisienne naturalisée française.
Née de parents juifs, elle a été mariée, en premières noces, avec Paul Halimi puis, en secondes noces, avec Claude Faux, ancien secrétaire de Jean-Paul Sartre dont elle a été l'amie et l'avocate. Elle a eu trois fils dont le journaliste Serge Halimi (1955).
Elle entre au barreau de Tunis en 1949 et poursuit sa carrière d'avocate à Paris en 1956.
Fortement engagée dans plusieurs causes, elle milite pour l'indépendance de l'Algérie, dénonce les tortures pratiquées par l'armée française et défend les militants du MNA (mouvement national algérien) poursuivis par la justice française. Dans le même esprit, elle préside une commission d'enquête sur les crimes de guerres américains au Viêt Nam.
Féministe, Halimi est signataire en 1971 du Manifeste des 343, parmi 343 femmes qui déclarent avoir avorté et réclament le libre accès aux moyens anticonceptionnels et l'avortement libre.
Aux côtés de Simone de Beauvoir, elle fonde en 1971 le mouvement féministe Choisir la cause des femmes et milite en faveur de la dépénalisation de l'avortement.
Au procès de Bobigny en 1972, qui eut un retentissement considérable, elle défend une mineure qui s'était fait avorter après un viol, en faisant une tribune contre la loi de 1920. Ce procès a contribué à l'évolution vers la loi Veil de 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse.
Élue à l'Assemblée nationale de 1981 à 1984 elle constate avec amertume que ses projets n'avancent pas autant qu'elle le souhaiterait et elle dénonce un bastion de la misogynie. Son amendement instaurant un quota pour les femmes aux élections a pourtant été voté à la "quasi-unanimité" par les députés, en 1982. La mise en échec de cet amendement revient au conseil constitutionnel qui le considéra comme une entrave à la liberté du suffrage et à la libre expression de la souveraineté nationale. Bien que nommée par lui ambassadrice de la France auprès de l'UNESCO, d'avril 1985 à septembre 1986, elle se déclare déçue devant un Mitterrand qu'elle juge machiavélique. Elle rejoint Jean-Pierre Chevènement à l'occasion des élections européennes de 1994 (elle figure en seconde position sur la liste du MDC). Gisèle Halimi est également une des fondatrices de l'association altermondialiste ATTAC.
Pour la promotion de Pâques 2006, Gisèle Halimi est promue au grade d'officier de la légion d'honneur.
Elle est décédée en Juillet 2020.
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