mardi 13 octobre 2020

Tattoo

 

Voyage en désespérance….

Nous avions laissé Jack adolescent dans son Kansas natal. Il vit dans un coin paumé, dans une caravane avec ses grands-parents. Sa ma mère vend ses charmes, et le beau-père est en cabane.

Voilà le décor ; pas très engageant. La pauvreté est extrême ; tant économique qu’intellectuelle, morale ou culturelle.

Nous sommes en 1945, Jack voudrait se sortir de la misère. Il truque ses papiers pour s’engager dans la marine… 

Autant le dire tout de suite, Jack est un cas désespéré ; un looser de première ; la poisse lui colle aux basques, et ils choppent les âneries au vol de peur qu’elles ne lui échappent. Et pourtant, on a tellement envie qu’il s’en sorte ; qu’il prenne du plomb dans la cervelle, qu’il s’assagisse, qu’il devienne un homme responsable, un mec bien qui bosse et puisse nourrir sa famille.

Et non, il gâche tout ce qu’il touche. Et quasiment toujours parce qu’il a le cerveau dans la culotte. Jack est un obsédé du sexe, et ce depuis qu’il est tout petit. Il saute sur tout ce qui bouge, et quand il a une fille sous la main, il n’y a plus rien à tirer de lui.

Du Kansas en Asie du sud-est dans un premier temps, puis du Kansas en Allemagne dans un second temps, Jack est toujours entre deux espérances, deux projets, toujours avec une fille (de joie, ou pas). Jack ne manque pas d’ambitions, mais il rate toujours une marche pour les réaliser.

Comme dans "Un Jardin de sable", Earl Thompson nous immerge dans cette Amérique pauvre à l’extrême, celle des laissés pour compte, des sans voix, celle des désinhibés. Au sortir de la seconde guerre mondiale, l’auteur nous montre une Amérique puritaine où les adolescentes sous des airs de ″ne pas y toucher ″ sont particulièrement délurées et libérées.

L’écriture est toujours aussi crue, mais le contexte est moins insoutenable dans la mesure où les faits sont moins transgressifs. Néanmoins, cet opus reste glauque, mais tellement marquant, car Jack est un type attachant malgré tout ce qu’il a de répulsif et répugnant.

Cette lecture, comme le premier volet, aura été particulièrement marquante, déstabilisante, prenante…. Assurément, un livre qui fera date. J’attends avec impatience le dernier opus.

Tattoo de Earl Thompson, traduit de l’américain par Jean-Charles Khalifa, aux éditions Monsieur Toussaint Louverture (j 2019, 1010 pages ; première parution en 1974)


 

Earl Thompson est un écrivain américain (1951/1978).

Il a servi dans la Marine américaine de 1945-1946 et dans l'Armée à partir de 1948-1954, servant en tant que Sergent de Première Classe, chef de char, et le Premier Sergent.

Au début des années 1950, il a étudié le journalisme à l'Université du Kansas. Il a fréquenté l'Université du Missouri de 1954-1957, et l'Université de Columbia en 1959-1960.

"Un Jardin de sable" (A Garden of Sand, 1970), son premier roman, est nommé pour le National Book Award.

"Tattoo" (1974), son second roman, est choisi par le Book of the Month Club.

Earl Thompson est décédé subitement à l'apogée de son succès, après avoir publié seulement trois romans dont "Caldo Largo" (1976).

Le quatrième "The Devil to Pay", a été publié à titre posthume, en 1982.


 


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