lundi 26 avril 2021

Là où tout se tait



Après avoir donné la parole aux victimes tutsies, aux bourreaux, à ceux qui revenaient d’incarcération, après avoir mis en lumière Englebert, après avoir rencontré et laissé s’exprimer les descendants des protagonistes (des deux camps) de ce qu’il est convenu d’appeler de nos jours le génocide rwandais, Jean Hatzfeld s’attarde désormais à celles et ceux qui ont résisté à la folie meurtrière. A l’instar des justes reconnus pour avoir sauvé, protégé, ou aidé des juifs durant la seconde guerre mondiale, des hommes et femmes hutus ont eux aussi ‶refusé″ de se laisser entrainer, de tuer, ou tout simplement ont à mesure de leurs moyen protégé les tutsies.

A l’épreuve du temps beaucoup ont disparu. Jean Hatzfeld s’est appliqué à parler de ces héros du quotidien, de ces sauveteurs improbables, ces aidants invisibles, en donnant la parole aux tutsies survivant encore en possibilité de témoigner, et surtout de rendre justice à celles et ceux longtemps considérés comme des traitres, et qui pour beaucoup ont payé de leur vie.

Nous ferons donc connaissance avec Isidore, Eustache, Marcienne, Marcel, Espérance et Setatakwe, que racontent celles et ceux qui les ont connus, qu’ils ont aidés, sauvés, cachés...

Jean Hatzfeld laisse à chacun son degré de langage, son phrasé le plus souvent particulier et surprenant de prime abord. L’entrée en matière ne m’a pas forcément parue aisée ; tout comme la structure du récit qui peut perdre, parfois, mais qui de toute évidence prend aux tripes.

Si les Justes des Collines s’effacent peu à peu, Jean Hatzfeld s’emploie grâce à ce récit poignant, à leur rendre l’hommage et la visibilité qu’ils méritent !

Là où tout se tait de Jean Hatzfeld, chez Gallimard (Janvier 2021, 225 pages)


Journaliste et écrivain, né en 1949,Jean Hatzfeld a séjourné plusieurs mois au Rwanda depuis le génocide et plus précisément sur les collines de Nyamata où il a recueilli les témoignages des rescapés et écrit "Dans le nu de la vie", récits des marais rwandais (prix France-Culture, 2000). Il a aussi publié "L'Air de la guerre" (prix Novembre, 1994), "La Guerre au bord du fleuve" (1999), "Une saison de Machettes" (prix Femina essai et prix Joseph-Kessel), "La statégie des antilopes" (Prix Médicis 2007, Ryszard Kapuscinski Prize 2009), "Où en est la nuit" (grand prix de Littérature sportive), "Un papa de sang (prix Mémoire Albert Cohen), Englebert des collines,

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