Les esprits chagrins penseront à un énième livre sur les camps ; un énième témoignage qui ressemble finalement aux précédents.
Oui, c’est vrai, d’autres avant Edith Brück ont pris la plume pour dire l’indicible. On pourrait penser que tout a été dit, que désormais, tout le monde sait.
Il n’en reste plus tant que cela de ces hommes et femmes qui ont connu la Shoah. Edith Brück est de ceux-là, derniers témoins vivants d’une tragédie qui aurait dû servir de leçon. Et pourtant, l’histoire plus récente a prouvé qu’il n’en était rien, et qu’il fallait encore et encore dire, raconter, écrire pour sans cesse rappeler aux générations suivantes que rien, rien n’est jamais acquis !
Edith Brück est très âgée, sent que sa mémoire s’en va. A l’instar de son compatriote Primo Levi, elle prend la plume pour témoigner à nouveau sur son vécu. Elle qui après sa sortie des camps a eu du mal à trouver sa voie, à s’installer quelque part, à se stabiliser, rend un hommage vibrant à sa patrie d’adoption, l’Italie tout en étant d’une grande lucidité sur les dangers à venir.
En quelques 170 pages, Edith Bruck nous livre un texte émouvant, avec en particulier les dernières pages poignantes sous la forme d’une Lettre à Dieu, qu’elle nomme le Grand Silence.
Chaque témoignage est unique, aucun n’est de trop, ni inutile ! A commencer par celui-là !
Le pain perdu d’Edith Bruck, traduit de l’italien par René Ceccatty, aux éditions du Sous-sol (Janvier 2022, 176 pages)
Edith Bruck, née Steinschreiber, voit le jour le 3 mai 1931 à Tiszabercel en Hongrie. À sa déportation, elle consacre à partir de 1959 plusieurs récits et poèmes dans la langue italienne qu’elle a adoptée en choisissant de vivre à Rome, dès 1954. Épouse du poète et cinéaste Nelo Risi, elle évoque souvent cette passion dans ses romans. Journaliste, scénariste, documentariste, comédienne, cinéaste, dramaturge, elle a multiplié les activités, sans jamais renoncer à témoigner de son expérience et sans jamais recourir à la haine.
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