mardi 22 février 2022

Au-delà des illusions

 

Ce roman arrive assez tôt dans la production littéraire de l’auteur, en tout cas bien avant qu’elle ne publie chez Sabine Wespieser.

Dans un contexte post -révolutionnaire au Vietnam, Linh, une enseignante reconnue, se retrouve confrontée aux lâchetés de son mari, prêt à toutes les compromissions pour survivre dans un climat politique délicat qui ne laisse guère de place à la libre expression artistique et intellectuelle. Linh, qui reste accrochée à son idéal de droiture ne peut supporter son équilibriste de mari qui ne veut surtout pas faire de vagues.

Cet opus est d’une facture très asiatique dans le sens où l’action compte peu, contrairement à l’introspection qui est l’objet principal d’un très beau, et parfois un peu longuet, portrait de femme.

Tous les personnages de ce roman sont confrontés à la perte le leurs illusions de jeunesse ; tous liés l’un à l’autre ils ne peuvent que constater la fragilité de leurs édifice intime.

Duong Thu Huong a fait le choix d’une construction classique. Son écriture est soignée.

Ayant déjà lu précédemment certains de ses romans plus récents, j’ai trouvé celui-ci plus sec, moins étoffé et davantage dans la retenu ; sans être dénué d’intérêt pour autant !

Au-delà des illusions de Duong Thu Huong, traduit du vietnamien par Phan Huy Duong, aux éditions Picquier (1998, et 2001 pour la version poche, 335 pages)

Duong Thu Huong est née en 1947 au Vietnam, elle est originaire du delta du fleuve Rouge (Nord-Vietnam). Issue d’une famille révolutionnaire (son père a été chef d’un groupe de travail durant la réforme agraire de 1953-1956), membre du Parti communiste, elle fait partie de la génération Hô Chi Minh. À vingt ans, elle dirige une brigade de la jeunesse communiste du mouvement « Chanter plus haut que les bombes » envoyée au front pendant la guerre, sur le 17e parallèle, dans la région la plus bombardée du Vietnam.

De retour à Hanoï en 1977, elle devient scénariste pour le cinéma vietnamien. À partir de 1980, alors qu’une de ses pièces de théâtre est censurée, elle conteste violemment la censure et la lâcheté des intellectuels. À partir de 1989, la politique du « renouveau » marquant le pas, Duong Thu Huong devient de plus en plus populaire dans l’opinion publique et de moins en moins acceptée par le pouvoir.

Avocate des droits de l’homme et des réformes démocratiques, elle n’a cessé de défendre vigoureusement, à travers ses livres, ses engagements, pour finir par être exclue du Parti en 1990 pour « indiscipline », avant d’être arrêtée et emprisonnée sans procès le 14 avril 1991. Son arrestation provoqua un large mouvement de protestation en France et aux États-Unis, dans les organisations de défense des droits de l’homme. Elle fut libérée en novembre 1991.

Elle est venue pour la première fois en France en 1994, sur l’invitation du ministre de la Culture, M. Jacques Toubon, qui l’a décorée Chevalier des Arts et des Lettres. À cette occasion, le ministre lui a proposé la nationalité française, qu’elle n’a pas voulu accepter alors, jugeant nécessaire de poursuivre au Vietnam son combat pour la démocratie. De retour à Hanoï, elle y a vécu en résidence surveillée. Malgré cet exil intérieur, et bien que ses livres soient désormais interdits de publication dans son pays, Duong Thu Huong reste au Vietnam un des écrivains les plus populaires et les plus discutés.

Arrivée à Paris fin janvier 2006 pour la sortie de son dernier livre traduit en français chez Sabine Wespieser éditeur, Terre des oublis, qui a été très favorablement accueilli, elle est restée en France. Terre des oublis a obtenu le Grand Prix des Lectrices ELLE, dans la catégorie roman, le 29 mai 2007 (60 000 exemplaires vendus en grand format et 250 000 au Livre de poche).

Son premier livre dans l’ordre de l’écriture, Itinéraire d’enfance, édité au Vietnam en 1985, à une époque où elle était encore « l’enfant chérie du parti communiste », a paru en mai 2007 (Sabine Wespieser éditeur). Et Au Zénith, son grand livre politique, portrait romanesque de Hô Chi Minh, en janvier 2009.

Son œuvre est traduite dans le monde entier : en France, sont également parus Histoire d’amour racontée avant l’aube (Éditions de l’Aube, 1991), Les Paradis aveugles (1991) et Roman sans titre (1992), tous deux aux Éditions des Femmes. Au-delà des illusions (1996) et Myosotis (1998) ont été publiés aux Éditions Philippe Picquier. Roman sans titre a été réédité chez Sabine Wespieser éditeur en novembre 2010, et Les Paradis aveugles en novembre 2012.

Dans Sanctuaire du cœur (Sabine Wespieser éditeur, septembre 2011) et Les Collines d’eucalyptus (Sabine Wespieser éditeur, janvier 2014), qui constituent un diptyque, la romancière, hantée par le destin des enfants de ceux qui se sont battus comme elle pour des idéaux – et ne se reconnaissent pas dans le Vietnam d’aujourd’hui –, aborde pour la première fois le Vietnam contemporain et échafaude deux hypothèses pour la fugue de Thanh, son jeune héros. Sans cesse, et de manière déchirante, elle pose la même question : qu’avons-nous fait à nos enfants?

Duong Thu Huong vit désormais en France avec un titre de séjour, mais sans plus de passeport vietnamien. Elle se consacre toujours à l’écriture et à la lutte

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