Si lire peu de nouveautés ringardise sans doute un peu le blogueur, j’y vois plusieurs avantages : vider ma pile, mais surtout en exhumer de véritables pépites. Comment ai-je pu laisser jaunir aussi longtemps ce bon gros pavé comme je les aime ?
Roman et biographie, Racines est un savant mélange des deux genres.
On y suit depuis le printemps 1750, à l’intérieur des terres de la Gambie en Afrique de l’ouest, le destin d’un petit garçon épanoui au milieu des siens, attaché à sa terre, ses traditions, sa religion, et qui en ce temps là comptait les mois en lune et les années en pluie, puis en cailloux. Kinté grandit au rythme de sa tribu, selon les lois ancestrales que rien ne semble perturber. Ainsi va la vie. Sauf qu’un jour, sans doute un peu plus imprudent qu’à l’accoutumée, Kinté se fait capturer par les toubas. Jamais il ne reverra sa famille, jamais il ne reverra son pays. A l’issue d’un voyage maritime éprouvant et mortifère, il est débarqué sur le côtes du Maryland et alimenter un trafic humain à grande échelle que l’on nommera plus tard la traite négrière ou l’esclavage
Le destin de Kinté est donc scellé, lui et sa descendance sera esclave dans les champs de coton et de tabac, avec tout ce que cela comporte de drame, d’horreur, humiliation et de cynisme.
Ce petit garçon est l’arrière-arrière-arrière- grand-père de l’auteur. Chaque génération a e ses drames, et ses bonheurs aussi. Parce que ce qui frappe c’est la solidarité dans la communauté d’esclave, l’esprit de résilience, leur fierté malgré les humiliations permanentes, cette flamme qui vibre toujours au sein de ces hommes et femmes persuadés que viendra le temps de l’émancipation.
A force de travail, de courage et d’obstination, chaque génération parvient à l’élever, à se motiver pour faire mieux que la précédente sans pour autant la renier.
Cet ouvrage est remarquable pour sa dimension historique parce qu’il restitue sans caricature la réalité peu glorieuse de l’esclavage, qui bien aboli aux US à l’issue de la guerre de Sécession pris pour encore de nombreuses années le chemin de la ségrégation raciale. Pour reconstituer cette histoire familiale sur 250 ans, l’auteur a procédé à de nombreuses recherches, mais il est retourné également là où tout avait commencé.
J’ai beaucoup apprécié cette lecture, émouvante à bien des égards, révoltante, douloureuse. L’écriture est agréable, rythmée, chantante par moment, teintée du parlé de ces gens qui pour beaucoup préféraient cacher qu’ils savaient lire plutôt que d’endurer les représailles de leurs maîtres.
Racines d’Alex Haley, traduit de l’américain par Maud Sissung aux éditions J’ai lu pour l’édition de poche, 750 pages. Première parution française en 1977.
Alexander Murray Palmer Haley (1921-1992) est un écrivain afro-américain.
Il obtient l'équivalent du bac à l'âge de 15 ans. Il suit les cours à l'Université puis, en 1939, s'enrôle dans la garde côtière des États-Unis en tant que messboy. C'est pendant cette période qu'il commence à écrire des nouvelles. À la fin de la Seconde Guerre mondiale il est transféré à sa demande dans le service "journalisme" de la garde côtière. Il y reste jusqu'à sa retraite en 1959, à la suite de laquelle il entame sa carrière d'écrivain.
Il collabore avec plusieurs magazines, dont Playboy, au sein duquel il a inauguré la rubrique "Playboy interview". Ses entretiens perspicaces et détaillés sont remarqués. Une des plus célèbres interviews d'Alex Haley est celle de Malcom X, précédant sa collaboration à l'autobiographie de l'activiste. Plus tard, Haley rédigea anonymement l’"Autobiographie de Malcom X", publiée en 1965, et fondée sur des interviews effectuées peu avant la mort de Malcom X.
Ce travail traduit en huit langues a fait d'Alex Haley un auteur réputé, et lui a valu la célébrité.
Parallèlement, dès 1964, les histoires familiales qu'Alex Haley avaient entendues dans sa jeunesse le poussent à étudier son ascendance maternelle, d'origine africaine. Haley conduit sa recherche dans la bibliothèque du Congrès et en Grande-Bretagne, où les compagnies maritimes affrétaient les convois esclavagistes. Il se rend également au petit village de Juffureh, en Gambie.
Douze ans après le début de ses recherches, en 1976, Alex Haley publie "Racines" (Roots: The Saga of an American Family), un roman fondé sur l'histoire de sa propre famille, et qui commence par l'histoire de Kunta Kinte, enlevé en Gambie en 1767 pour être vendu comme esclave en Amérique.
Alex Haley remporte le National Book Award 1976 pour "Racines". En 1977, il reçoit le prix Pulitzer, ainsi que la médaille Spingarn de l'Association Nationale pour l'amélioration des conditions des gens de couleur. Le livre s'est vendu à plus de 1,6 million d'exemplaires dans les six premiers mois qui suivirent sa publication. Il a été traduit en 37 langues.
Sa notoriété fut ternie en 1978 par des accusations de plagiat.
Une mini-série télévisé "Racines" (Roots, 1977) a été tiré de son livre ainsi qu'un remake diffusé sur la châne History en 2016.
Livre lu dans le cadre du challenge organisé par Enna .
Merci pour ton avis sur le livre! J'avais vu la série de 1977 qui a eu un impact incroyable aux Etats-Unis si ça t'intéresse : https://ennalit.wordpress.com/2019/02/24/racines-roots-saison-1-serie-televisee
RépondreSupprimerun des romans les plus forts sur le sujet et qui a vu son adaptation rappeler au monde cette douleur de l'esclavage
RépondreSupprimerVous avez raison : lire ou relire des ouvrages publiés il y a un bon moment est toujours l'occasion de découvrir.
RépondreSupprimerBonne journée.