mercredi 14 septembre 2022

Un enfant sans histoire


 Adrien et moi avons à prendre soin d’un enfant qui ne grandira jamais. Paul aura pour toujours dix-huit mois d’âge développemental, mais il a la force d’un garçon de six ans, et aura ensuite celle d’un adolescent puis d’un adulte…″

Notre pays n’est pas en pointe pour la prise en charge, l’accompagnement des enfants autistes et de leurs familles. L’auteur de ce témoignage digne et réaliste le vit au quotidien avec Paul, son fils chez qui on diagnostique un trouble du spectre de l’autisme. A mesure que l’enfant grandit, Minh Tran Huy doit se rendre à l’évidence, ce petit garçon est différent des autres. A cela s’ajoute, les hésitations thérapeutiques, le manque de professionnels, de structures, et surtout un parti pris psychanalytique qui pose les bases d’une culpabilité de la mère dans sa relation à l’enfant, plutôt que de développer très tôt les compétences de l’enfant, fusse-t-il différent des autres.

Pour illustrer son propos, Minh Tran Huy, oppose le récit de son expérience parentale et conjugale dans cette épreuve, avec celle de Temple Grandin, née autiste en 1947 en Nouvelle-Angleterre, et qui, à la faveur d’une prise en charge radicalement différente parviendra à s’épanouir personnellement, intellectuellement, et professionnellement.

L’auteur, s’est beaucoup documenté, d’abord pour Paul, pour frapper aux bonnes portes ,lui offrir les meilleures prises en charge , mais aussi, c’est ce qui me parait le plus important, pour alerter, remuer les consciences, faire bouger les choses, faire évoluer le regard que les institutions portent sur ce handicap qui bouleverse en profondeur la vie familiale, l’équilibre d’un couple, et pointer le manque de formation des professionnels, des enseignants, le manque de structure d’accueil et de soin.

Ce récit est très bien construit, très documenté.

Le ton est juste, sans pathos. Minh Tran Huy, n’est pas dans le ressentiment, même si tout au long de la lecture, on perçoit bien les difficultés énormes, l’inertie, une certaine culpabilité envers Paul : J’aurais voulu t’offrir une vie plutôt qu’un livre ; et surtout l’angoisse qui étreint cette mère en ce qui concerne l’avenir de son petit garçon.

Le combat de cette mère est le combat de toutes les mères, les anonymes, les modestes, les non initiées, les sans relations ; toutes celles qui se battent au quotidien, souvent seules et démunies pour offrir à leur enfant le meilleur, et surtout la dignité.

Un enfant sans histoire de Minh Tran Huy, aux éditions Actes Sud (Août 2022, 208 pages)


Minh Tran Huy est une romancière française d'origine vietnamienne.

Diplômée de Lettres, elle travailla comme rédactrice en chef adjoint au "Magazine Littéraire" et comme chroniqueuse sur différentes émissions littéraires.

En 2007 paraît son premier roman "La Princesse et le Pêcheur". Son second roman "La double vie d'Anna Song" (2009) fut récompensé par le prix Pelléas, le Prix des lecteurs du Salon Livres et Musiques de Deauville, ainsi que du Prix Drouot 2010.

Ayant abandonné sa carrière journalistique, elle travaille désormais comme directrice de collection chez les éditions Flammarion.

1 commentaire:

  1. De par mon âge ce type de livre me touche beaucoup, j'ai vécu hélas la période noire où l'on accablait les mères qui manifestement avaient raté quelque chose pour provoqué les troubles chez l'enfant ! j'ai fait ma formation avec cette idée puisque que de grands médecins, de grands psychologues nous l'affirmaient
    heureusement on a fait machine arrière pour autant la prise en charge est toujours problèmatique aujourd'hui encore De tels livres ne sont pas inutiles

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