Emmanuel Carrère a suivi, à sa demande, pour un hebdomadaire, le procès des attentats du 13 novembre 2015, passionné qu’il est pour la chronique judiciaire. Il a ainsi produit chaque semaine une chronique de 7800 signes. Ce livre est la réunion de ses articles remaniés, arrangés et remis en forme.
Comme beaucoup, les attentats de ce funeste vendredi 13 m’ont bouleversée, mais j’ai très vite souhaité passer à autre chose sur le plan de l’actualité. Je n’ai donc pas suivi le procès, pas plus que je n’ai lu ce qui s’en disait dans la presse.
J’aborde donc cet ouvrage avec un regard neuf, et en étant finalement peu documentée sur ces évènements tragiques.
Carrère se placera selon trois points de vue ; ses billets seront consacrés successivement à propos des victimes, puis des accusés, puis de la cour.
Il décrit de manière chirurgicalement et la plus neutre possible ce qui va constituer des mois durant un procès hors normes, tant en ce qui concerne la chose jugée, que le nombre de personnes qui se croiseront dans ce tribunal reconstitué de toute pièce.
Alors que d’ordinaire, Emmanuel Carrère aime assez parler de lui dans ses ouvrages, ici, il se met en retrait pour ne faire que relater ce qu’il a vu, entendu, et perçu durant les nombreuses audiences auxquelles il a assisté. On y apprend beaucoup de chose, sans voyeurisme, avec la rigueur journalistique et le recul nécessaires, et la plume soignée d’Emmanuel Carrère. Le propos est à la fois plein d’humanité, de gravité et de moments émouvants. Carrère se laisse parfois aller à un peu d’humour qui allège peu ou prou l’ensemble.
V13 d’Emmanuel Carrère aux éditions P.O.L (Août 2022, 370 pages).
Ancien élève de Janson-de-Sailly et diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, descendant d'une lignée de princes russes où l'on a même compté un éphémère roi d'Albanie, il est le fils de Louis Édouard Carrère et de la soviétologue et académicienne Hélène Carrère d'Encausse, et le frère de Nathalie Carrère et de Marina Carrère d'Encausse.
Emmanuel Carrère est l'auteur de plusieurs scénarios, d'une biographie de Philip K. Dick et de nombreux romans dont "La moustache", "La classe de neige", et "L'Adversaire", les deux derniers ayant été adaptés pour le cinéma respectivement par Claude Miller et Nicole Garcia et sélectionnés en compétition officielle au Festival de Cannes.
"Retour à Koltelnitch" (2004) est son premier film en tant que réalisateur. Son dernier film, "La moustache", avec Vincent Lindon et Emmanuelle Devos, est sorti en 2005.
L'Adversaire, écrit autour de l'affaire Jean-Claude Romand, qui a défrayé la chronique au début des années 90, marque un changement dans sa production littéraire. Il n'a pas depuis écrit de pure fiction. "Un roman russe" publié en 2007 ménage une place prépondérante aux habitants de Kotelnitch, Anya, Sacha et tous les autres ... sans oublier Toma Andras, le malheureux hongrois, dont la vie s'est perdue durant presque 50 ans après la guerre dans l'hôpital psychiatrique de Kotelnitch. Dans "d'autres vies que la mienne" (2009) il évoque l'existence marquée par le drame de personnes qu'il a rencontrées au cours de sa vie.
En 2011, "Limonov", une biographie romancée de l'écrivain, dissident et homme politique russe, a reçu le prix Renaudot. En 2014, "Le Royaume" qui raconte l’histoire des débuts de la chrétienté, vers la fin du Ier siècle après Jésus Christ, obtient le prix littéraire du Monde.
En 2018, Emmanuel Carrère obtient le prix de la Bibliothèque Nationale de France (BNF).
Excellent livre; pareil, je n'ai pas suivi le procès et ignorais le verdict. J'avoue même que pour moi V13 n'a été connu que S14 (je me couche tôt et/ou pas d'infos après une certaine heure.)
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