« Le cap Horn est l’endroit le plus redoutable
de la terre. Les bateaux y disparaissent sans laisser de traces. »
Nous
retrouvons Alejandro, qui était dans un précédent livre de l’auteur, le dernier
mousse. Désormais il est radiotélégraphiste, il guide les bateaux dans le grand
sud chilien. Seulement l’appel du grand large est plus fort. Avec son frère-ceux
qui ont lu le dernier mousse comprendront- et quelques sbires un peu en marge,
il prend le large, plein sud, à la recherche de l’Antartide (autrement dit la
partie chilienne de l’Antarctique).
Comme
à son habitude, Francisco Coloane se fait court, concis et percutant. Avec peu
de mots, à la manière des taiseux d’autrefois, Coloane peint le grand sud. Le lecteur
imagine sans peine ce qui lui est dit avec autant de parcimonie que de force.
Je
serais incomplète si je passais sous silence l’engagement de l’auteur pour les communautés
oubliés, ici les Yaghan qui peuplent (et plus vraisemblablement peuplaient) l’extrême
sud du continent américain.
On
navigue entre le roman et le conte. C’est un peu plus déroutant que dans d’autres
ouvrages de l’auteur ; mais pas inintéressant. En tout cas, avec l’expérience
(petite, j’en conviens) que j’ai de l’auteur, cela ne me gêne plus. Peut-être
vais-je tenter d’aborder les nouvelles de l’auteur, qui, parait-il, ont bonne
presse.
« Ce goulet est une véritable entaille dans la
cordillère ; court et profond, il libère les eaux du canal de Beagle vers
le cap Horn. En ce bout du monde, la nature est hostile et violente. Les côtes
sont dépourvues de plage car la montagne plonge à pic dans la mer ; la
végétation se réduit à des bosquets de robles rabougris, une herbe rase et des
lichens qui tentent de grimper, puis apparait la roche nue, telle la peau
crevassée d’un colossal pachyderme. »
Je
ne sais pas pour vous qui me lisez, mais en ce qui me concerne, j’ai vraiment
envie d’aller voir sur place….
Antartida
de Francisco Coloane, traduit de l’espagnol (Chili) par François Gaudry, chez
Phébus (1999,110pages), disponible en poche chez Libretto (2014,110 pages).
Francisco
Coloane est un
écrivain chilien, né à Quemchi, Chiloé en 1910 et mort à Santiago en 2002 .
Son
père Juan Agustín qui décède, vaincu par le diabète, alors que Francisco n'a
même pas dix ans, était capitaine du Yelcho, le premier baleinier du Chili. Sa
mère, Humiliana Cárdenas, était agricultrice.
En
1923, il fait son premier voyage sur l'océan pour rejoindre Punta Arenas, à
l'extrême sud du pays. Il s'y installe avec sa mère et fait ses études au
séminaire de Ancud. Mais comble de malheur, sa mère décède à son tour en 1925.
A l'âge
de 17 ans, Francisco abandonne le collège pour gagner sa vie. Il fait son
service militaire et multiplie les expériences professionnelles : éleveur de
moutons, dresseurs de chevaux, ouvrier agricole, baleinier, etc. Ces
expériences lui permettent de côtoyer la population des régions arctiques où se
mêlent marins, chasseurs de phoques, chercheurs d'or, contrebandiers,
trafiquants et aventuriers mais aussi de connaître le mode de vie des Indiens
dont il sera un grand défenseur.
Il
écrit son premier conte intitulé "Chiens, chevaux, hommes", imitant
l'œuvre de Ferdinand Ossendowski ("Bêtes, hommes et dieux").
C'est
pendant un voyage à bord du navire école General Baquedano, qu'il a l'idée
d'écrire "Le Dernier Mousse", publié en 1941 et qui sera lu par deux
générations de chiliens. Le livre conte les aventures du jeune Alejandro Silva
Cáceres qui s'embarque clandestinement à bord du Baquedano, une corvette de la
marine dont c'est le dernier voyage et qui sera désarmée lors de son retour au
port.
Il
exerce la fonction d'inspecteur du travail à Punta Arenas, ce qui lui permet
d'observer les rapports entre patron et employé, constatant tous les abus et
les désarrois.
En
1936, il repart pour Santiago et occupe un poste au Service Culturel au
Ministère du Travail. Il s'y lie d'amitié avec Pablo Neruda, Nicómedes Guzmán,
Oreste Plath et d'autres écrivains empêtrés dans la bureaucratie pour pouvoir
survivre.
En
1941, il reçoit le Prix du concours Zig-Zag pour "Le Dernier Mousse".
En 1964, il reçoit le Prix National de Littérature, et en 1966 il est élu
Président de la Société des Écrivains du Chili. En 1980, il devient membre de
l'Académie chilienne de la Langue. En 1997, il est fait Chevalier des Arts et
des Lettres en France.
Un titre qui me semble parfait pour le challenge Amérique latine que j'organise à la suite de Bidib, noté !
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