Voilà ce que j’écrivais il y a deux ans à propos de Les étoiles s’éteignent à l’aube :
″J'ai beaucoup apprécié ce roman ; et c'est à avec plaisir que je retrouverai l'auteur avec Jeu Blanc. ‶
Avec le recul, je crois bien qu’à cette époque je n’avais pas pleinement mesuré la qualité de plume de l’auteur, ni de la portée de ses écrits. Wagamese n’est plus, il me faudra prendre le temps de déguster son ultime roman, parce qu’après, ne resteront que les souvenirs …
Saul, indien de la tribu des Ojibwés est en cure de désintoxication alcoolique. Parce qu’en racontant leurs histoires, les buveurs invétérés sont sensés se libérer de la bouteille, Saul, persuadé de sortir de là plus vite se prête au jeu…
Alors qu’il perd ses parents et grands-parents, la famille étant déjà marquée par les méfaits de l’homme blanc, Saul se voit imposé brutalement le pensionnat catholique, afin d’y être éduqué, ou plus exactement dressé, et surtout débarrassé de son indianité, et de son humanité. Saul se prend de passion pour le hockey sur glace, sport pour lequel il devra lutter âprement pour pouvoir jouer, d’abord, et tenter de s’y épanouir dans sa vie d’adulte ensuite.
Jeu blanc raconte avec à la fois subtilité, dignité et violence le déni d’humanité à l’égard des indiens. Durant l’enfance de Saul, il fallait à tout prix effacer toute trace de culture indienne à ces peuples que l’on retrouve à l’âge adulte brisés et rompus aux addictions, et aux difficultés sociales inextricables.
Saul, s’accroche à sa passion, s’acharne au travail, à l’entrainement ; Il fait face avec courage au racisme très en vogue au Canada dans les années 70. Nul besoin d’être féru, et connaisseur de hockey pour apprécier pleinement ce livre ; présent mais pas trop, je n’ai ressenti aucune longueur lorsque nous suivons Saul dans son apprentissage et son perfectionnement. L’essentiel est finalement bien ailleurs, plus intime, plus enfoui ; seul le retour aux origines permettra à Saul de commencer à se libérer de ses démons.
″Ce sport me permettait d’éviter de voir la vérité, de devoir lui faire face jour après jour. Plus tard, après mon départ, le sport m’empêcha de me souvenir. Aussi longtemps que je pus m’y réfugier, je pus m’envoler. M’envoler et ne jamais devoir atterrir sur la terre brûlée de mon enfance. ″
Wagamese s’emploie, dans ce superbe roman à décrire un homme qui affronte avec courage son passé et ses traumatismes pour mieux retrouver ses racines, ses valeurs, et les richesses de l’identité indienne.
Un roman émouvant, révoltant, et beau car l’espoir y permis.
Jeu blanc de Richard Wagamese, traduit de l’anglais (Canada) par Christine Raguet aux éditions Zoé (2017,250 pages), 10/18 (2018,265 pages), première parution traduit en français par Paul Gagné aux éditions XYZ (Québec) sous le titre Cheval indien.
Richard Wagamese (1955-2017) était un auteur et journaliste canadien.
En activité depuis 1979, il a exercé comme journaliste et producteur pour la radio et la télévision, et est l’auteur de treize livres publiés en anglais par les principaux éditeurs du Canada anglophone. Wagamese appartient à la nation amérindienne ojibwé, originaire du nord-ouest de l’Ontario, et est devenu en 1991 le premier indigène canadien à gagner un prix de journalisme national. Depuis lors, il est régulièrement récompensé pour ses travaux journalistiques et littéraires. Il est notamment le lauréat du Prix national de réussite indigène pour les médias et les communications 2012, et du prix 2013 du Conseil canadien des arts.
Parmi ses derniers romans en date, "Indian Horse" est sorti en 2012 et a été récompensé par le prix du public lors de la Compétition nationale de lecture du Canada. En 2013, Wagamese a publié "Him Standing", paru chez Orca Press.
L’auteur a reçu le titre de docteur ès lettres honoris causa à la Thompson Rivers University de Kamloops en 2010 et à la Lakehead University de Thunder Bay en 2014.
"Les étoiles s’éteignent à l’aube" (Medicine Walk) est son premier roman traduit en français. Récit de l’ultime voyage d’un père, que son fils accompagne, ce roman est aussi une histoire de transmission, de racines, à travers l’exploration de paysages somptueux, la découverte d’un passé enfoui, une ode à la terre et à l’amour.
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