″Tuer l’indien dans l’enfant‶
Ils sont rares ces livres coup de cœur, coup de gueule, coup de poing ; ces livres qu’on lit d’une traite la boule au ventre. Ils sont rares ; de plus en plus rares…Maikan en est un, assurément !
Durant de nombreuses années, le Canada a envoyé des générations entières d’enfants autochtones dans des pensionnats dans le but de les ‶civiliser‶, de les évangéliser, les assimiler en les coupant de leurs familles, de leur culture, pratiquant un endoctrinement organisé avec l’assentiment des gouvernements et de l’Église.
Michel Jean, revient sur le cas particulier du pensionnat de Fort George, où furent envoyés, entre autres, Marie, Virginie et Charles. Trois enfants trois symboles de la barbarie auxquels l’auteur rend hommage en racontant leur histoire sur deux plans narratifs.
D’une part, en 1936, dans le grand nord canadien, nous prenons part à la vie du pensionnat avec les petits Autochtones qui arrivent en ce début d’année scolaire pour y être pris en charge par les missionnaires catholiques. Les enfants les nommeront les loups, ″Maikan″…Ici règnent l’humiliation et la violence, tandis qu’entre les enfants se nouent la solidarité et l’amitié.
D’autre part, en 2013, une avocate canadienne, Audrey Duval, mène bénévolement des recherches parmi les survivants de ce sinistre pensionnat. Sa détermination l’amènera auprès de Marie, vielle femme abimée par la vie, et l’alcool, qui peu à peu lui accordera confiance en levant le voile sur ce qui s’est passé.
Ce roman paru initialement en 2013, dénonce la triste histoire des amérindiens d’Amérique du nord. Il fait échos au le long travail de vérité et réconciliation alors que de nos jours, on découvre encore des sépultures anonymes de divers pensionnats.
Ce roman poignant s’inscrit au cœur de la question amérindienne. Il raconte la funeste destinée de toutes ses communautés, mais également sa fierté, de sa résistance malgré tout et sa renaissance.
L’aspect romancé de cet opus donne une dimension particulière à la question indienne, dont Michel Jean est un ardent défenseur.
Déjà séduite par Kukum dans laquelle Michel Jean levait déjà un voile pudique sur l’assimilation forcée des populations Autochtones, je ne suis pas près d’oublier le cruel destin de Marie, Virginie et Charles, ni l’abject père Rouge.
Maikan de Michel Jeanaux éditions dépaysage (Juin 2021,270 pages) Première parution sous le titre Le vent en parle encore (2013, aux éditions libre expression).
Issu de la communauté innue de Mashteuiatsh, établie sur la rive ouest du lac Saint-Jean au Québec, Michel Jean est journaliste d’enquête et chef d’antenne à TVA, un réseau de télévision canadien francophone. Il a publié une dizaine de livres, tous salués par la critique outre-Atlantique.
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