dimanche 2 juin 2024

Cézembre

 

″Pour les touristes de passage, Cézembre n’était qu’une île parmi d’autres, posée au bord du rivage. La plupart ignoraient jusqu’au nom de ce rocher. Pour nous, elle était unique, à l’épicentre du ban d’histoire qui nous reliait. (…) On y avait nagé, prié, trouvé refuge et tourmenté. On y avait aimé et tué.

La passion des secrets de famille n’est parfois rien d’autre qu’une névrose égoïste. ″

Dans la famille Kérambrun, il y a eu l’arrière-grand-père qui a fondé la compagnie de transport maritime. Cézembre, le bout de terre au large de St Malo, l’a largement inspiré pour en fournir son contour au logo d’une compagnie qui se transmettra de père en fils. Sauf, que le dernier maillon, Yann, n’en voudra pas. Son frère ainé lui, n’avait pas résisté aux injonctions familiales. Sauf que Guillaume est mort jeune. L’entente entre Charles (le père) et Yann n’étant pas au beau fixe, c’est à une nièce que la destinée de l’entreprise a été confiée.

Yann, n’est lui pas dans une très grande forme ; son mariage bat de l’aile, sans pour autant accepter pour le moment d’y mettre fin. Quand son père meurt, c’est à lui que revient l’autre partie de l’héritage familial. Une superbe propriété, bâtie juste en face de Cézembre par son aïeul. Les Couërons, c’est le nom du domaine, regorge d’archives familiales…

Yann, professeur à la Sorbonne, à la faveur d’un congé sabbatique, revient aux sources. Il s’était fixé comme objectif de rédigé un traité sur la piraterie ; et finalement c’est son histoire familiale qui va le rattraper, l’accaparer, le dévorer. Il ne savait, en fait pas grand-chose des générations précédentes. Entre les brouilles internes, les non-dits, les secrets, Yann va au fil de ses lectures, reconstituer un puzzle qui s’avère bien plus compliqué et explosif qu’il n’imaginait. D’indices, en fausses pistes, il parvient à se frayer un chemin le menant vers une vérité dont il ne sait pas toujours s’il est très judicieux de l’exhumer.

Le roman s’articule entre les documents écrit et photographiques (Hélène Gestern aime la photo) dont Yann prend connaissance au fil de ses recherches, de retrouvailles familiales, et de moments plus actuels faits de promenades, d’embruns, tempêtes, et d’introspections. Yann renoue avec son histoire intime, mais aussi et surtout avec la Grande Histoire qui a laissé ses traces à Cézembre.

Hélène Gestern aime les histoires à énigmes, et creuser le passé et l’intimité des familles. Ses livres se ressemblent, et pourtant à chaque fois sont différents. La recette semble bien huilée, et à chaque fois cela fonctionne parfaitement. Elle nous offre ici une saga malouine iodée à souhait, intelligemment construite et documentée, sans temps mort et à l’écriture soignée !

″Le seul héritage qui compte c’est l’amour qu’on reçoit.

Cézembre d’Hélène Gestern, aux éditions Grasset (Mars 2024, 560 pages)

Hélène Gestern est une écrivaine française née à Nancy.

Elle est également enseignante-chercheuse à l'Université, où elle est rattachée à un laboratoire spécialisé dans l'étude du lexique.

Son premier roman "Eux sur la photo" relate une enquête menée par deux personnages à la recherche de l’histoire de leurs parents, à partir de quelques photographies. Ce roman, traduit en anglais et en italien, a reçu le Prix "Coup de cœur des lycéens" de la Fondation Prince Pierre de Monaco, le Prix René-Fallet et le Prix premier roman de Culture et bibliothèques pour tous de la Sarthe. En 201, parait "La part du feu" chez Arléa .

Dans "Portrait d’après blessure", publié en 2014, Hélène Gestern s'interroge sur le droit à l’image.

"L’odeur de la forêt", publié en 2016, est une enquête menée par une historienne de la photographie à propos des lettres et de l'album photographique d'un soldat de la Première Guerre mondiale. Le livre a été traduit en allemand et en espagnol.

"L’eau qui dort", publié en 2018, raconte l'histoire d'un représentant de commerce qui disparaît sans laisser de traces.

En 2022, "555" reçoit le Grand prix RTL-Lire.

2 commentaires:

  1. je viens de le terminer et j'ai beaucoup aimé comme ses livres précédents
    J'ai beaucoup aimé 555 et surtout l'Odeur de la forêt


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  2. Je l'ai récupéré à la bibli il y a quelques jours, hâte de m'y mettre !

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