mercredi 13 septembre 2023

Les derniers indiens


Ce court roman occupe la troisième place dans la bibliographie de Marie-Hélène Lafon. Il est donc ancien, et pourtant il n’a rien d’une œuvre de débutante ! Nous sommes dans le Cantal, sur une terre qui sera pour l’auteur son terreau nourricier, sa matrice pour ses romans.

Les Santoire vivent dans cette maison depuis quatre générations. Marie et son frère Jean ne se sont pas mariés, ils perpétuent ce que la mère, le père, et avant eux les parents de la mère (visiblement, ce sont les femmes qui portent la culotte, conservent leur nom…). La mère a durablement imprimé sa marque, ses principes, ses silences, et ses mystères aussi ; celles et ceux qui arriveront au dernier paragraphe me comprendront….

Rien ne bouge dans cette maison, le temps s’écoule sans que ces derniers se sentent concernés ; ils ont leurs habitudes, leurs manies ; ils semblent réellement d’un autre monde. Après eux, il n’y aura rien, ni personne ; ils n’ont pas d’enfants ; ce sont les derniers de la lignée ; les derniers indiens !

 En face de chez eux, il y a les voisins, radicalement différents. Ils vivent eux. Alors forcément ça cause, ça cogite.

Marie-Hélène Lafon dessine avec précision les contours d dernier maillon d’une lignée familiale voué à disparaître, emportant avec elle les derniers relents d’un autre temps, d’une histoire révolue, d’une paysannerie d’autrefois. Il y a beaucoup de mélancolie dans ce court et lumineux roman.

Décidément j’apprécie de plus en plus l’écriture de Marie-Hélène Lafon, qui dans des phrases courtes, ciselée, travaillées parvient parfaitement à camper le décor de ses histoires, insuffler une atmosphère sans jamais donner à son lecteur l’impression de tournée en rond. Nul besoin pour elle de diluer son propos, elle va droit au but, ne tergiverse pas, non sans avoir le talent de laisser le lecteur deviner les choses sans les dire.

Les personnages de Marie-Hélène Lafon ne s’oublient pas ; ils nous touchent autant qu’ils nous échappent ; Elle a fait de la mère pourtant morte, la figure tutélaire plus vivante que jamais.

Les derniers indiens de Marie-Hélène Lafon, aux éditions Buchet-Chastel (Janvier 2008,208 pages, rééditions en 2022) et Folio (2009 ,170 pages).

Marie-Hélène Lafon est une professeure agrégée et écrivaine française née en 1962.

Née dans une famille de paysans, elle est élève à l'Institution Saint-Joseph (collège) puis à La Présentation Notre-Dame (lycée) deux pensionnats religieux de Saint-Flour.

Elle part ensuite étudier à Paris, à la Sorbonne, où elle obtient une maîtrise de latin et le CAPES de lettres modernes. Elle obtient également un Diplôme d'études approfondies (DEA) à l'Université Paris III-Sorbonne Nouvelle puis un doctorat de littérature à l'Université Paris VII-Denis Diderot.

Elle devient agrégée de grammaire en 1987. Elle enseigne le français, le latin et le grec dans le collège Saint-Exupéry, Paris 14e, en banlieue parisienne, dans un collège situé en Zone d’Éducation Prioritaire, puis à Paris, où elle vit.

Elle commence à écrire en 1996, à 34 ans. Son premier roman "Le soir du chien" (2001) est récompensé par le prix Renaudot des lycéens en 2001.

Elle avait précédemment écrit des nouvelles - pour lesquelles elle ne trouvait pas d'éditeur - dont "Liturgie", "Alphonse et Jeanne", qui seront publiées l'année suivante dans le recueil "Liturgie" (2002), récompensé par le prix Renaissance de la Nouvelle en 2003.

Elle préside le prix littéraire des lycéens de Compiègne en 2003-2004.

Lauréate de nombreux prix, Marie-Hélène Lafon obtient le Prix du Style 2012 pour "Les Pays" et le Prix Goncourt de la nouvelle en 2016 pour "Histoires". Elle reçoit le Prix Renaudot 2020, pour son roman "Histoire du fils" Nos vies, en 2017 ; Joseph en 2014 ; Les sources en 2023 ;

Célibataire et sans enfant, son département d'origine, le Cantal, et sa rivière, la Saintoire, sont le décor de la majorité de ses romans.

 

2 commentaires:

  1. J'avais écarté cette autrice parce que j'avais lu deux-trois de ses romans qui ne m'avaient pas emballée... je crois que je vais bientôt changer d'avis. A voir...

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  2. Bonjour Mimi, je constate à l'instant que ce roman vient d'être réédité. Je n'en n'avait pas entendu parler. Je le note car j'apprécie beaucoup l'écriture Mme Lafon (qui est née la même année que moi). Bonne journée et très bonne année 2024.

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